Qu’est-ce que le ministère à l’ère numérique ?

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Les données sur l’œuvre de Dieu à l’ère numérique

Andrew Feng, Lara Heneveld, Rodrigo Tinoco & Danny Weiss

Données numériques, monde numérique

En 2006, Clive Humbly, mathématicien britannique et entrepreneur dans le domaine de la science des données, a inventé l’expression « data is the new oil » [les données sont le nouveau pétrole], préfigurant l’importance des données pour l’ère numérique naissante. La science des données en était encore à ses premiers stades de développement en Occident, et l’Église dans son ensemble avait souvent une relation quelque peu étriquée avec l’information missionnelle. Le pratiquant occidental moyen n’avait tout simplement pas la conscience nécessaire pour acquérir ou s’interroger sur l’existence d’une telle ressource, sans parler de ses coreligionnaires du Sud planétaire. Remarquablement, de nombreuses personnes dans le monde majoritaire ont souvent une relation très différente avec les données en tant qu’industrie ou science.

Remarquablement, de nombreuses personnes dans le monde majoritaire ont souvent une relation très différente avec les données en tant qu’industrie ou science.

Historiquement, les données sur les organismes chrétiens reflétaient des informations principalement obtenues pour des publics missiologiques occidentaux, en ce sens qu’elles traitaient souvent de questions telles que la présence des Évangéliques, les préoccupations relatives à l’accès à l’Évangile et à la disponibilité des Écritures, ou le suivi de dénominations au niveau national. Ceux qui voyaient un intérêt à connaître ces données utilisaient les résultats disponibles pour informer la stratégie missionnelle occidentale. Ces informations étaient souvent élaborées en vue d’un projet, d’un objectif ou d’une stratégie spécifique, mais la plupart d’entre elles étaient conservées et protégées par ceux qui les avaient créées et publiées. Pour qu’elles aient plus d’importance, il fallait que les utilisateurs potentiels sachent que de telles ressources étaient disponibles ; le mode de protection et de production des données mondiales pouvait ne pas être connu en dehors de l’organisme chrétien d’origine. Inversement, les données pouvaient avoir une valeur non perçue par des publics auxquels elles n’étaient pas destinées à l’origine.

L’appétit pour des données mondiales complètes, cohérentes et accessibles s’étant accru, les ensembles de données sur les missions, accessibles au public, ont pris de l’importance. Par exemple, des ressources telles que Operation World1 et World Christian Encyclopedia2 ont édité des volumes complets (et, à une certaine époque, sur CD), fournissant un contenu propre à catalyser la prière, qu’ils continuent à mettre à jour et à publier périodiquement. Cependant, l’existence même et la viabilité de certains de ces rares fournisseurs de données concernant les organismes chrétiens dépendaient souvent de la monétisation du matériel imprimé ou du produit qu’ils fournissaient. Faute de cela, certains ont trouvé un soutien personnel pour financer leur recherche, d’autres ont obtenu un parrainage pour des projets individuels ou, parfois, le travail a été financé par des fonds personnels. D’autres fournisseurs, comme Global Mapping International (www.gmi.org), n’ont finalement pas été en mesure de continuer à servir dans leur rôle de fournisseurs de services techniques clés aux chercheurs. Ces exemples de travail ont mérité l’estime qu’on leur a accordé, mais ont aussi involontairement montré une prédilection pour les opinions des leaders missionnels anglophones et occidentaux, parfois au détriment d’une contribution mondiale.

Puis, en mars 2020, le monde a changé, et avec lui, l’importance et la pertinence de l’ère numérique. Les répercussions sociétales de la pandémie de COVID ont imposé de nouvelles normes en matière de mouvement, d’interaction et de participation.3 Les types de données auxquelles les gens font confiance et la manière dont ils interagissent avec ces données ont changé.4 Dans certains cas, COVID a même modifié les croyances. Dans les semaines et les mois qui ont suivi le 15 mars 2020, le monde numérique est devenu non seulement le principal moyen d’échange d’informations, mais il affecte désormais presque tous les aspects de notre vie. Les fonctions ecclésiales et missionnaires qui, traditionnellement, auraient été menées uniquement en personne, ont été suspendues ou ont dû s’adapter. COVID a eu une incidence sur le lieu et la manière dont les missionnaires ont pu être envoyés, ainsi que sur les personnes en mesure de participer à « l’Église » ou désireuses de le faire. 5 Personne ne savait combien de temps durerait l’interruption ni si nous reviendrions un jour à la « normale ».

COVID a modifié notre relation aux données du service pour Dieu de diverses manières. La confiance du public dans l’autorité mondiale en matière de données s’est érodée, en partie à cause de la politisation de la couverture des données sur la pandémie.4 Cela a encouragé un réexamen de la validité des données et de la méthodologie de leur collecte dans tous les domaines.6,7 COVID a permis de nouveaux modes et modèles de communication qui ont amené des réseaux relationnels auparavant distants dans des orbites plus étroites et plus transparentes. Les questions ou préoccupations de longue date concernant les données missionnelles approuvées par les dirigeants du monde occidental et du monde majoritaire se sont transformées en opportunités pour des actions sans qu’on ait besoin de s’en excuser. Ces discussions ont souligné le fait que le monde était en mesure de changer beaucoup plus rapidement que les systèmes de données existants et que les paradigmes pouvaient désormais refléter ces changements. D’ailleurs, la véracité absolue et la pertinence temporelle à la minute près étaient-elles vraiment des données idéales à obtenir ? Les données autrefois familières concernant le service chrétien, s’en sont trouvées mises en question. Les données pourraient-elles devenir plus efficaces pour informer la stratégie du service chrétien dans ce nouvel environnement changeant ? Les ensembles de données traditionnels seraient-ils relégués à un niveau de plus en plus faible au fur et à mesure que le monde continuait de changer ?

Les données concernant le service chrétien, et les données en tant que service chrétien, seront plus importantes que jamais, car le monde numérique fait de la compréhension immédiate, de l’accès et de la connectivité relationnelle la nouvelle norme.

Ces changements amplifient l’urgence pour l’Église mondiale de réévaluer la manière dont elle soutient les données et interagit avec elles en tant que service chrétien. Les données intègrent la recherche, l’information et la technologie que les forces chrétiennes émergentes utilisent pour la communication, l’éducation, le déploiement et l’application de l’orientation stratégique du service chrétien. Les données concernant le service chrétien, et les données en tant que service chrétien, seront plus importantes que jamais, car le monde numérique fait de la compréhension immédiate, de l’accès et de la connectivité relationnelle la nouvelle norme.

Transformation des données de service chrétien

La quantité quantifiable de données que les églises et œuvres chrétiennes du monde entier et leurs équipes sont désormais en mesure de traiter est sans précédent, portant sur tout et sur rien, de l’interaction numérique avec l’Évangile aux enquêtes sur les communicateurs oraux, en passant par les coordonnées GPS des églises de maison. Et cela continuera à se développer à mesure que de nouveaux besoins des Églises et œuvres chrétiennes seront révélés et que s’engageront de nouveaux travailleurs capables d’innover. L’accessibilité des données à l’échelle mondiale transforme la manière dont les données sont collectées, interprétées et appliquées de manière stratégique. Alors que le corps du Christ ne cesse de s’étendre et de se diversifier, l’objectif à poursuivre sera d’avoir des données mondiales permettant la gestion, la propriété et l’utilisation par un corps qui reflète mieux l’Église d’aujourd’hui.

En outre, un tout nouveau domaine d’étude et d’expertise autour de la science des données, de l’analyse des données et de l’ingénierie des données a vu le jour et s’est développé au cours de la dernière décennie. Les progrès récents de l’intelligence artificielle et de l’apprentissage automatique font progresser le domaine des données à un rythme toujours plus rapide vers des frontières encore inimaginables. En effet, au moment où ce document sera lu, nous devrions nous demander si nos perspectives actuelles sur les données concernant le monde chrétien seront toujours d’actualité.

L’Église mondiale se trouve à un moment charnière de la révolution moderne des données. Elle repose sur les fondations héritées d’un noyau de données sur les œuvres chrétiennes générées par un groupe restreint de travailleurs dévoués (dont presque aucun n’était salarié), et sur un avenir où les opportunités et les applications de ces données globales et l’accès aux talents d’un large groupe de professionnels et de praticiens des données sont apparemment infinis. Dans un monde émergent où tout est informatisé, la pertinence des données à la minute près est absolument nécessaire pour une stratégie de travail chrétien éclairée. La question n’est pas celle de la pertinence ou de la collecte des données, mais celle de leur intégration et de leur interprétation. L’Église doit disposer d’un personnel et d’un équipement adéquats pour naviguer dans cette nouvelle ère.

Les compétences fondamentales que sont la maîtrise des données, la collecte de données et, plus particulièrement, l’interprétation des données deviennent indéniablement des fonctions essentielles du ministère de l’Église mondiale. La Communauté des Travailleurs de l’Information sur la Mission (CMIW)8 attire l’attention du corps du Christ sur la nécessité d’impliquer et d’équiper l’Église mondiale dans l’utilisation des données comme un ministère, en tant qu’élément essentiel pour faciliter les efforts du Mandat missionnaire dans les décennies à venir. Les œuvres chrétiennes travaillant autour des données doivent être intégrés dans le tissu de l’Église mondiale d’aujourd’hui, qui est en pleine maturation.

Consolidation des données au niveau mondial, prolifération des données au niveau local

Certaines évolutions concernant les données des organismes chrétiens justifient une attention particulière.

Consolidation des données régionales et mondiales des organismes chrétiens pour en faire des ressources clés

Des sources telles que le Joshua Project,9le rapport Global Status of Evangelical Christianity (GSEC) tel qu’il est rapporté par l’International Missions Board (IMB) des Baptistes du Sud-américains ,10 la Cooperación Misionera Iberoamericana (COMIBAM),11 et le Movement for African National Initiatives (MANI)12 sont souvent utilisés dans le cadre de stratégies d’implantation d’Églises et de formation de disciples. D’autres travaux et sources, tels que le Center for the Study of Global Christianity,13 Ethnologue,14 et Progress.Bible15 sont plus académiques dans leurs objectifs et leurs recherches. Nous reconnaissons que tous ces éléments ne sont pas nécessairement d’origine occidentale ni de portée mondiale, et cette évolution vers l’inclusivité est la bienvenue. Ces sources constituent l’épine dorsale de nombreuses stratégies chrétiennes bien raisonnées et financées, parfois au point de prendre le pas sur les connaissances et les réalités des personnes qu’elles s’efforcent de représenter. L’enjeu pour ces ensembles de données mondialement réputés sera de maintenir une représentation précise alors que leur influence et leur autorité s’étendent et se consolident.

Expansion rapide de ce qui constitue les données chrétiennes elles-mêmes

Il s’agit notamment de savoir ce qui est mesurable et mérite d’être mesuré, comment l’identifier et qui peut y avoir accès ou l’appliquer. Par conséquent, la préférence va de plus en plus à des chercheurs de première main et à leurs sources de données. Les opportunités pour la collecte de données par la communauté16 se font remarquer et les niches illustrent le fait que les données doivent souvent être spécifiques aux besoins d’un organisme chrétien. Des projets autrefois considérés comme de moindre-priorité, difficiles à financer ou peu pratiques à soutenir par les voies traditionnelles peuvent désormais être réalisés grâce à des innovations techniques aussi simples et accessibles que les outils GPS disponibles sur les smartphones.17

Ces deux évolutions – la consolidation des données mondiales et la prolifération des possibilités de données locales – répondent à des besoins pressants et peuvent apparaître comme la prochaine étape de l’évolution des données et de l’information. Cependant, elles peuvent aussi devenir inutilement opposées les unes aux autres. Il n’est pas nécessaire qu’il en soit ainsi, car les deux ont une valeur stratégique si elles sont encouragées de manière interdépendante.

Valeur et problème des données mondiales

Les ensembles de données mondiales sont très utiles pour dégager un consensus, fournir une vue d’ensemble et contribuer à l’élaboration d’une stratégie de haut niveau et à l’affectation des ressources. Pourtant, les sources de données sont loin d’être infaillibles, ce qui peut être contre-intuitif pour certains utilisateurs finaux. Les stratèges de la mission chrétienne dépendent de l’information pour la perspective, la prise de décision stratégique, le déploiement et même le financement de projets, même si ces données sont imparfaites ou indisponibles en « temps réel ». Bien entendu, fournir des données parfaites est plus facile à dire qu’à faire.

Les données mondiales sont difficiles à collecter, et les organisations et réseaux qui aident à les collecter manquent cruellement de personnel, de fonds et de ressources. Les données nécessitent une immense quantité de contribution, de conservation et de mise en contexte. Ce que les utilisateurs d’informations sur les missions ne comprennent pas toujours, c’est que chaque élément d’information a la possibilité d’être traité et ajusté pour s’intégrer dans le contexte de l’ensemble. De par leur nature même, les ensembles de données mondiaux nécessitent un accord sur la terminologie et les paramètres, qui ne reflètent pas toujours les nuances propres à chaque communauté ou situation. Cela n’est pas intrinsèquement trompeur, car les détails statistiques, les populations et les changements démographiques se produisent constamment et ces éléments doivent être réconciliés. Pourtant, en réalité, celui qui possède et conserve les données possède et informe la perspective qu’elles reflètent. Cela peut aller de la fausse déclaration involontaire, à l’omission ou à la négligence pure et simple. Cela ne crée pas seulement le risque d’une stratégie mal alignée, mais peut aussi perpétuer le malaise entre les communautés locales et les autorités chargées des données qui sont censées les représenter. Il faut dire que les effets négatifs de la consolidation des données mondiales étaient imprévus et involontaires.

Parfois, les modèles de financement exigent des « paywalls », ou cadres d’accès payants, et la sensibilité devient un obstacle suffisamment important pour que même l’accès public de base aux données de l’organisme chrétien (en particulier pour l’Église du monde majoritaire) devienne un obstacle majeur. Comment peut-on se fier à l’utilité et à la pertinence de données mondiales lorsque les communautés locales sont confrontées à des obstacles qui affectent leur capacité à contribuer aux ensembles de données mondiales ou même à y accéder ?

Valeur et problème des données locales

Inversement, la valeur des données locales ou particulières réside dans leur proximité avec la source réelle, non seulement sur le plan géographique ou contextuel, mais aussi sur le plan temporel. Les personnes vivant aujourd’hui dans une communauté rom en Europe de l’Est, un village en Afrique de l’Ouest, un jati en Inde ou une génération particulière en Chine, ont toutes des priorités différentes quant à la manière dont elles perçoivent leur propre auto-représentation. Ces données locales peuvent évoluer plus rapidement que les ensembles de données mondiales ne sont actuellement en mesure de faire. Les données particulières (locales) mettent l’accent non seulement sur la précision et la nuance de la représentation et de l’identification, mais aussi sur l’appropriation locale. De cette manière, les données ne sont pas seulement évaluées, interprétées et communiquées au niveau local, mais elles sont également prises en charge au niveau local ; la validation externe devient secondaire. Les données ne sont pas extraites des communautés, elles leur appartiennent et sont gérées par elles. Il peut s’agir de la terminologie, des mesures utilisées, de la méthodologie de collecte, des droits de distribution et de l’application stratégique. Le compromis ici est que l’agrégation globale et un siège à la table des données mondiales s’obtiennent souvent au prix de l’appropriation locale et de l’auto-identification.

Contrairement aux données mondiales, les données locales se heurtent à la limitation intentionnelle de leur portée. L’absence de terminologie, de mesures et de méthodes de collecte normalisées peut rendre difficile l’agrégation mondiale tant que les données ne sont pas normalisées et transformées. Les données locales et les données particulières deviennent difficiles à intégrer, se heurtent à l’obstacle d’une faible interopérabilité et multiplient les obstacles potentiels à l’accès et à la validation. Paradoxalement, l’inondation de multiples sources de données peut involontairement nuire à la clarté de la stratégie de l’organisme chrétien en créant la discorde et la désunion en cas de conflit. Il convient toutefois de préciser que les conflits et les écarts font partie intégrante de la science des données. Cependant, en multipliant les voix, les plateformes, les applications et les connexions entre des ensembles de données disparates sans une intention prudente, on court le risque de voir s’effondrer l’intégrité ou l’utilité de l’ensemble de la plateforme d’information pour les organismes chrétiens. Il pourrait en résulter un chaos stratégique, ce qui serait catastrophique pour la stratégie des missions mondiales.

Les données locales exacerberont également la question de la sécurité et de la sensibilité. Les données granulaires peuvent tout aussi bien être utilisées pour la stratégie de l’organisme chrétien que contre celui-ci. Certains craignent que l’accessibilité accrue aux données n’entraîne une persécution injustifiée ou une limitation (voire une suppression) des possibilités d’exercer unservice chrétien. La propriété, la gestion et l’accès aux données sont des préoccupations tout à fait légitimes, et il peut très bien y avoir des situations où il vaut mieux garder des données locales ou particulières loin des yeux de l’accès mondial. Trouver le juste équilibre entre visibilité et sensibilité a été et restera de plus en plus un point de tension. Il existe peut-être un avenir immédiat dans lequel les systèmes de données peuvent répondre aux besoins et aux défis des systèmes de données mondiaux et des connaissances locales. En tant que communauté d’information sur les missions, nous pensons que c’est la voie à suivre.

Les données en tant que service de l’Église mondiale

La tension entre les mérites des données mondiales et locales sera un sujet essentiel à aborder et à diffuser alors que l’Église est aux prises avec les implications des données des organismes chrétiens à l’ère du numérique. Souvent, les données mondiales et les données locales sont considérées comme intrinsèquement opposées, en particulier lorsque l’Église est obligée de choisir entre deux valeurs concurrentes ou deux systèmes de données concurrents à la recherche d’une source unique de vérité. Mais comme les données des organismes chrétiens servent de plus en plus à plusieurs fins ou perspectives, l’équilibre entre des ensembles de données et des systèmes de données multiples ou contradictoires devra être une chose que l’Église sera capable d’accepter. De nouveaux systèmes de données et de nouvelles approches pourraient-ils être découverts pour permettre ces divergences ? Nous l’espérons.

Sous-estimation et sous-financement des données en tant que ministère

La fausse dichotomie entre les données mondiales et les données locales est principalement alimentée par une mentalité de pauvreté longtemps entretenue en ce qui concerne le financement des données en tant que service chrétien et le renforcement des capacités de collecte, d’analyse et d’interprétation des données. Si l’Église mondiale n’accorde pas de valeur ou de capacités au financement de l’intendance du travail d’information sur les missions, alors les données sur les organismes chrétiens sont réduites à leur strict minimum – une liste singulière écrite à partir d’une perspective singulière, souvent inadaptée, d’un monde qui devient de plus en plus complexe. Cela se fait au détriment de l’Église mondiale.

Le fait de sous-estimer et de sous-financer les données en tant que service entrave gravement les possibilités que nous avons, en tant que membres de l’Église mondiale, d’améliorer la vision et la stratégie du Mandat missionnaire. Les données peuvent et doivent servir l’Église de multiples façons. Les données peuvent servir de référentiel ou d’index à l’échelle mondiale, mais elles peuvent aussi servir de base à une stratégie nuancée au niveau local pour une question, un paradigme ou une cause donnés, défendus par un contingent local. Elles peuvent servir de plateforme pour l’inclusion, le crowdsourcing et la collaboration, ou servir à démontrer l’autorité et la crédibilité. Elles permettent d’identifier les tendances. Elles peuvent prédire l’avenir. Elles peuvent contribuer à créer une représentation. Plusieurs ensembles de données contradictoires peuvent en fait contribuer à améliorer la précision en offrant des perspectives différentes et en invitant à une collaboration accrue.

Accueillir et soutenir les données en tant que service

Le plus grand ennemi de l’utilité de données solides sur les organismes chrétiens est le manque de valeur et d’investissement dans la maîtrise des données par l’Église mondiale. Les données, en tant que service, sont un don de Dieu évident que l’on constate dans toute l’Écriture, qu’il s’agisse des recensements, des plans architecturaux ou de l’enregistrement des généalogies. Elles sont nécessaires pour comprendre et essentielles comme guide pour une juste implication dans le Mandat missionnaire. Le service des données doit être accueilli, entretenu, géré et financé. Les capacités doivent être développées avec générosité et ouverture. Le partage des données, l’enseignement des données, l’inter-opérabilité des données, l’accès aux données, la contribution aux données et la gestion des données sont des composantes saines d’un service essentiel au service du corps du Christ.

En utilisant les technologies, les plateformes et les outils de connectivité existants, les données en tant que service chrétien peuvent être développées de manière appropriée. Les programmes de maîtrise des données en ligne peuvent faire partie des piliers de la formation au service de Dieu. En outre, ceux qui travaillent actuellement dans le domaine de l’information missionnelle peuvent rester ouverts aux possibilités nouvelles et innovantes, voire prodigieuses, que de nouveaux outils et de nouvelles perspectives pourraient offrir, en reconnaissant que ces possibilités sont révélées et dirigées par l’Esprit Saint. En promouvant les normes et l’inter-opérabilité des données, de nouvelles voix et perspectives peuvent être valorisées et ajoutées, sans compromettre l’intégrité du système de données missionnelles tel qu’il existe aujourd’hui.

Le corps du Christ pourrait-il, dans la mesure de ses possibilités, soutenir la transmission de compétences en matière de données, non seulement dans les organismes chrétiens locaux, mais aussi dans les réseaux mondiaux ? Nous reconnaissons que cela fait partie du développement et de la maturité de l’Église mondiale. Il peut être tentant de considérer les données comme quelque chose de clinique, de stérile, voire d’exclusif. Mais nous ne devons pas oublier ce que ces données servent, et qui elles représentent en fin de compte : la gloire de Dieu reflétée dans l’épouse du Christ.

Soutenir les données du service chrétien, c’est soutenir le système nerveux du corps du Christ, un système qui soutient la fonctionnalité dans presque tous les aspects de la communauté missionnelle mondiale. Ceci est indispensable à l’accomplissement du Mandat missionnaire. Dans les décennies à venir, l’information sur la mission en tant que service chrétien devrait être prioritaire, valorisée et intégrée comme partie intégrante de la formation de disciples et de la maturité de l’Église mondiale, pour l’Église mondiale, et détenue par l’Église mondiale. C’est à notre propre détriment que nous sous-estimons la valeur des données en tant que service de l’Église mondiale. La gestion des données du Mandat missionnaire est plus que jamais indispensable à la poursuite de la stratégie de ce Mandat à l’ère du numérique.

Notes

  1. Jason Mandryk. Operation World: The Definitive Prayer Guide to Every Nation. Downers Grove: InterVarsity Press, 2010.
  2. Todd M. Johnson and Gina Zurlo, eds. « World Christian Encyclopedia Online.” World Christian Encyclopedia Online, (Leiden, The Netherlands: Brill, n.d.). Accessed Jun 21, 2023, https://brill.com/view/db/wceo. 
  3. Fortune Business Insights. “The impact of COVID is accelerating digital connectivity trend and it will influence the growth of the Information technology market in the near future.” Accessed June 21, 2023. https://www.fortunebusinessinsights.com/impact-of-covid-19-on-information-communication-and-technology-ict-industry-102769.
  4. Richard Edelman. “Pandemic Fuels Culture of Institutional Mistrust.” World Economic Forum. January 13, 2021. https://www.weforum.org/agenda/2021/01/pandemic-mistrust-government-global-survey/.
  5. “Calvary Chapel Dayton Valley vs Sisolak.” Last modified July 24, 2020. https://www.supremecourt.gov/opinions/19pdf/19a1070_08l1.pdf#page=12#page=13.
  6. Samuel Escobar. Changing Tides: Latin America and World Mission Today, 2002.
  7. Lausanne Movement, “Len Bartlotti – Lausanne Movement.” Accessed July 5, 2023, https://lausanne.org/leader/len-bartlotti.
  8. “Welcome to the Community of Mission Information Workers!|Community of Mission Information Workers,”n.d. https://www.globalcmiw.org/.
  9. Joshua Project. “Joshua Project: People Groups of the World | Joshua Project.” https://joshuaproject.net/.
  10. PeopleGroups.org. “PeopleGroups.Org.” https://www.peoplegroups.org/.
  11. “Comibam Internacional – Cooperación Misionera Iberoamericana.” https://comibam.org/es/.
  12. Le Mouvement pour les initiatives nationales africaines (MANI) est un réseau de réseaux dont l’objectif est de catalyser les initiatives nationales africaines et de mobiliser les ressources du corps du Christ en Afrique en vue de l’accomplissement du Mandat missionnaire.  https://maniafrica.com/.
  13. Center for the Study of Global Christianity. “Center for the Study of Global Christianity | Gordon-Conwell Theological Seminary.” Last modified June 27, 2022. https://www.gordonconwell.edu/center-for-global-christianity.
  14. Ethnologue (Free All). “The World.” https://www.ethnologue.com/.
  15. ProgressBible. “ProgressBible.” https://progress.bible/.
  16. “Etnopedia – Unreached People Profile Translation.” https://etnopedia.org/.17.Fred Zahradnik. “GPS for Driving, Sports, and Boating.” Lifewire. Last modified January 29, 2020. https://www.lifewire.com/gps-for-driving-and-sports-1683301.

Biographies des auteurs

Andrew Feng

Andrew Feng est le directeur pour l’Amérique d’Indigitous, un mouvement qui encourage les jeunes leaders à utiliser leur talent au-delà des quatre murs de l’église. Andrew est un consultant sur la stratégie mondiale et les partenariats pour la collaboration de masse. Il étudie la possibilité d’externaliser les missions par le biais du travail à distance.

Lara Heneveld

Lara Heneveld travaille au service de Team Expansion sur l’information missionnelle. Co-facilitatrice de la Community of Missional Information Workers [Communauté des ouvriers missionnaires de l’information], elle assiste également Harvest Information Standards et a précédemment dirigé la recherche et la protection des données pour Finishing the Task, de 2007 à 2019. Parmi ses mentors figurent le Dr Paul Eshleman, le Dr Jim Haney, Dan Scribner et Chris Maynard.

Rodrigo Tinoco

Rodrigo Tinoco est un missionnaire de SEPAL et travaille pour la diffusion de l’information missionnelle. Il est le coordinateur national brésilien de Faith Comes by Hearing et est affilié aux alliances d’information CMIW (mondiale) et APeM (brésilienne). Chercheur en langues latino-américaines, il a travaillé dix ans en Asie et aux États-Unis, et est actuellement en poste au Brésil. Il est marié à Sarah et ils ont 4 enfants.

Danny Weiss

Danny Weiss travaille dans le domaine de l’intégration, de l’interprétation et de la visualisation des informations relatives aux missions. Ancien directeur de projet de Stratus.earth pour Radical, il travaille actuellement à la recherche et à l’application des tendances démographiques et du chevauchement multilingue pour unfoldingWord, un organisme chrétien dédié au ressourcement et à l’équipement de l’Église mondiale pour répondre à ses propres besoins en matière de traduction.

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