Quel est le fondement de la confiance ?

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La vérité objective contestée

Andrew Loke, Kevin Muriithi Ndereba & Mary Jo Sharp

Introduction

La vérité objective est communément considérée comme la pierre angulaire de la pensée rationnelle et de la recherche scientifique. C’est l’idée qu’il existe des faits et des principes qui existent indépendamment de nos croyances personnelles, de nos préjugés et de nos opinions. De nombreux philosophes expliqueraient en outre que la notion de vérité objective est liée à l’existence de la « réalité objective », à savoir « tout ce qui existe, tel qu’il est, indépendamment de toute conscience consciente qu’on puisse en avoir (via la perception, la pensée, etc.). »1 

Les Écritures chrétiennes affirment qu’il existe une réalité objective qui peut être connue par les humains :

  • La nature objective et connaissable de l’existence de Dieu (Romains 1.18-20) ;
  • La nature objective et connaissable des lois morales de Dieu (Romains 2.14-15) ;
  • La nature objective de l’Écriture (Psaume 19.7–9) ;
  • La nature objective de Jésus et ses paroles (Jean 14.6, Jean 18.37). 

Bien que les Écritures enseignent que la vérité est le chemin de la liberté, elles se concentrent également sur la réalité de la vérité en tant que personne – Jésus-Christ (Jean 8.32, 14.6). Le fondement de la confiance de la foi chrétienne est la vérité objective que « Christ est mort pour nos péchés… il a été enseveli, qu’il a été ressuscité le troisième jour, conformément aux Écritures » (1 Corinthiens 15.3-5). Car si Christ n’est pas ressuscité, la foi chrétienne est vaine (1 Corinthiens 15.17).

Les affirmations de vérité du christianisme en particulier ont été contestées par divers développements qui affecteront probablement le Mandat missionnaire et l’Église d’ici 2050.

Alors que les Écritures affirment une réalité objective accessible à l’être humain, le respect de la vérité objective a, peu à peu et depuis longtemps, subi une érosion, certains remettant en question son existence même. Les affirmations de vérité du christianisme en particulier ont été contestées par divers développements qui affecteront probablement le Mandat missionnaire et l’Église d’ici 2050. Dans cet article, nous allons explorer six des objections qui ont émergé dans diverses parties du monde.

Subjectivité et relativisme

L’une des principales objections à la notion de vérité objective vient de l’idée de subjectivité et de relativisme. Selon le Stanford Encyclopedia of Philosophy, « le relativisme, en gros, est l’opinion que vérité et fausseté, bien et mal, normes de raisonnement et procédures de justification sont des produits de conventions et de cadres d’évaluation différents et que leur autorité est limitée au contexte qui leur donne naissance. »2 En termes simples, cela signifie que ce qui est vrai pour une personne ou un groupe peut ne pas l’être pour une autre. De ce point de vue, le monde offre de nombreuses « vérités », ce qui est compliqué par les sensibilités postmodernes selon lesquelles « ma vérité est ma vérité, et votre vérité est votre vérité ». Compte tenu des réalités émergentes de perte de confiance envers les institutions d’autorité, notamment l’Église, l’État et la famille, les prochaines générations dans de nombreuses régions du monde explorent les questions de vérité par le biais d’influenceurs et de plateformes de médias sociaux, dont beaucoup remettent en question le concept de vérité objective.3

Le rejet problématique de la vérité objective en tant qu’élément significatif de la réalité est aggravé par un mépris accru de la philosophie, qui a traditionnellement fourni les outils intellectuels permettant de démontrer la nature autodestructrice du relativisme. Ce manque de considération est illustré par la déclaration faite par le physicien de renommée mondiale Stephen Hawking, « …la philosophie est morte. La philosophie n’a pas suivi les développements modernes de la science, en particulier de la physique. »4 Cette attitude envers la philosophie et la logique dans la culture occidentale plus largement, qui est basée sur une ignorance de l’importance fondamentale de la philosophie et de la logique pour toutes les disciplines académiques, y compris la physique,5 a affecté la capacité globale de la société à considérer ce qui est objectivement vrai et comment nous pouvons le connaître.

En 2016, le mot de l’année du Oxford Dictionary était « post-truth » (post-vérité). L’article le décrit ainsi : « post-vérité est un adjectif défini comme “ se rapportant à ou dénotant des circonstances dans lesquelles les faits objectifs ont moins d’influence sur la formation de l’opinion publique que les appels à l’émotion et à la croyance personnelle ” »6 L’humoriste américain Stephen Colbert a popularisé un mot connexe, truthiness (que l’on pourrait plus ou moins traduire en français comme véritude) à savoir « la qualité de paraître ou d’être ressenti comme vrai, même si ce n’est pas nécessairement vrai. »7 Cette idée de « véritude » exclut une enquête réfléchie sur la logique de ses croyances et nuit à la capacité de reconnaître un bon argument. L’Évangile de Jésus-Christ offre, en effet, une bonne argumentation pour aborder le problème de l’humanité.

Sans principes philosophiques de base, le témoignage chrétien peut être faussé de multiples façons. Le manque de connaissances sur la vérité et la réalité peut entraîner des croyances erronées. Les gens peuvent ne pas se rendre compte que leur raisonnement est faussé et s’accrochent à leurs points de vue en tant que vérités absolues. Lorsque le mauvais raisonnement est combiné à l’analphabétisme biblique actuel, le témoignage de l’Évangile est affecté négativement.8

Pour lutter contre les mauvais raisonnements, il est essentiel que les pasteurs, les enseignants et les autres responsables de services chrétiens enseignent à leurs congrégations des concepts philosophiques solides qui les aideront à comprendre, à interpréter et à interagir avec les Écritures de manière plus réfléchie. C.S. Lewis a proclamé : « La bonne philosophie doit exister, ne serait-ce que pour une autre raison, à savoir le besoin de répondre à la mauvaise philosophie. »9 Lorsque les chrétiens ne sont pas de bons penseurs, ils peuvent être « ballottés par les vagues et emportés par tous les vents de la doctrine, par la ruse humaine, par la ruse dans des stratagèmes trompeurs » (Éphésiens 4.14). 

Individualisme expressif

Une autre objection à la notion de vérité objective est l’émergence de l’individualisme expressif en Occident. La proposition de l’individualisme expressif est que : « Le plus grand bien est la liberté individuelle, le bonheur, la définition de soi et l’expression de soi. Les traditions, les religions, la sagesse reçue, les réglementations et les liens sociaux qui restreignent la liberté individuelle, le bonheur, la définition de soi et l’expression de soi doivent être remodelés, déconstruits ou détruits. »10 Cela a contribué au relativisme moral qui repose sur une autonomie morale, selon laquelle, à la suite de l’analyse que fait R.C. Sproul de la pensée de Jean-Paul Sartre (1905-1980), les êtres humains déterminent leur propre éthique et libertés.11 Dans un tel monde où la liberté et l’expression humaines sont le but ultime, le chaos et l’effondrement s’ensuivent dans les domaines de la sexualité, de la vie familiale et du tissu social, pour n’en nommer que quelques-uns.12

L’existence d’une réalité objective extérieure à un individu constituerait une menace perçue pour l’authenticité personnelle et la liberté individuelle, car la capacité de façonner la réalité à sa guise est essentielle à l’autonomie ultime. Cependant, lorsque la sagesse ou l’autorité externes ne sont plus valorisées, on devient esclave de ses propres opinions individuelles. Or, comme Jésus l’a dit, « vous connaîtrez la vérité et la vérité vous affranchira » (Jean 8.32). Sa proclamation était, en partie, destinée à nous libérer de nous-mêmes.

Biais de confirmation

« Le biais de confirmation est la tendance de l’esprit des gens à rechercher des informations qui soutiennent les opinions qu’ils ont déjà. Cela amène également les gens à interpréter les preuves d’une manière qui soutient leurs croyances, attentes ou hypothèses préexistantes. »13 En d’autres termes, les gens ont tendance à voir ce qu’ils veulent voir et à interpréter les informations d’une manière qui va soutenir leurs idées préconçues. Vivant dans un monde qui a été affecté par la chute, nous constatons que toute notre expérience humaine est affectée par le péché. Nos aspirations, nos affections et notre raisonnement sont ainsi empêchés de connaître la vérité et de vivre à la lumière de la vérité. En tant que personnes qui aiment la vérité, les chrétiens doivent se laisser examiner et scruter pour détecter de tels préjugés, apprendre à les surmonter et promouvoir les vertus intellectuelles de la justice, de l’impartialité, de l’honnêteté intellectuelle et de l’humilité.14

S’il n’est pas décelé (ou pris en compte) le biais de confirmation entrave la capacité d’une personne à considérer les preuves et la raison qui sont en conflit avec ses opinions. Lorsque le désir entre en conflit avec la croyance en Dieu, la capacité de raisonner sur Dieu est entravée. Quand le biais de confirmation se mêle à l’individualisme expressif prévalant en Occident, l’environnement qui en résulte est celui de la fragmentation intellectuelle et émotionnelle. Cette circonstance peut être particulièrement difficile lorsqu’une personne a souffert d’un traumatisme religieux.

Diffusion rapide de la désinformation

La montée des nouvelles trompeuses et de la désinformation vient aussi s’opposer à la vérité objective. Avec la prolifération des médias sociaux et d’Internet, il est devenu plus facile que jamais de diffuser de fausses informations et de la propagande. Or les chrétiens sont appelés à imiter les Béréens qui, selon Actes 17, prenaient la peine de vérifier la vérité de l’enseignement de Paul. À l’ère actuelle et celle à venir, nous devons être plus vigilants, en vérifiant les sources, puis en pesant ce qui est vrai. Sinon, nous pouvons involontairement ajouter à la confusion et à la méfiance parmi le public, ce qui rend difficile le témoignage de la bonne nouvelle de Jésus-Christ. 

La prétendue opposition entre science et christianisme

Alors que la religion joue un rôle de premier plan dans les sociétés africaines, les jeunes générations remettent de plus en plus en question les affirmations religieuses. Aujourd’hui, dans plusieurs grandes villes du continent africain, notamment des villes comme Lagos, Le Cap et Nairobi, on trouve de plus en plus de communautés humanistes, sceptiques et athées. Ce scepticisme général à l’égard des affirmations de la vérité chrétienne est avancé par les jeunes générations qui sont connectées à d’autres parties du monde à cause des nouveaux médias15 et il est alimenté par le point de vue du matérialisme scientifique. Dans le système fermé auquel donne naissance le naturalisme, les discussions sur le sens, le but et la rationalité sont grandement entravées.16 Le matérialisme scientifique sous-tend l’affirmation selon laquelle la foi et la science sont incompatibles, contribuant ainsi à des identités non religieuses et athées parmi la jeunesse urbaine africaine.17

Le récit selon lequel science et christianisme sont en conflit l’un avec l’autre est également promu en Chine, où il est fortement associé à l’idéologie marxiste. La perception répandue de ce conflit est en outre alimentée par des dirigeants chrétiens en Asie qui ont plus d’influence sur l’opinion des croyants sur la science qu’en Occident et qui favorisent souvent une attitude négative envers la science officielle. La clé pour corriger cette situation passe par l’éducation des futurs dirigeants chrétiens. De nombreux érudits chrétiens ont plaidé pour l’harmonie de leurs croyances avec la science traditionnelle, la distinguant du matérialisme scientifique et démontrant l’erreur de ce dernier, tandis que les jeunes dirigeants chrétiens reconnaissent souvent l’importance de la science et accueilleraient des érudits qui abordent respectueusement leurs croyances et leurs questions. Compte tenu des populations asiatiques si nombreuses, la formation des futurs dirigeants chrétiens en Asie est essentielle pour avoir un impact sur l’opinion publique mondiale future concernant la science et le christianisme.

Il a été démontré que la montée du nombre de personnes qui se déclarent « sans religion » est associée à une éducation scientifique généralisée et à une façon de penser agnostique connexe, ce qui a conduit à une « crise des croyances » qui a pris des « proportions épiques » dans les pays d’Europe occidentale tels que le Royaume-Uni.18 Cela affecte également les centres d’éducation asiatiques tels que Hong Kong et Singapour, où se trouvent les meilleures universités de la région.

Il a été démontré que la montée du nombre de personnes qui se déclarent « sans religion » est associée à une éducation scientifique généralisée et à une façon de penser agnostique connexe, ce qui a conduit à une « crise des croyances » qui a pris des « proportions épiques » dans les pays d’Europe occidentale tels que le Royaume-Uni.18 Cela affecte également les centres d’éducation asiatiques tels que Hong Kong et Singapour, où se trouvent les meilleures universités de la région. Lors d’un forum organisé par la Société biblique de Singapour intitulé « Recensement 2020, religions et jeunesse », les panélistes ont noté que le nombre d’adhérents chrétiens connaît une baisse significative dans le groupe d’âge de 25 à 44 ans, et que le christianisme semble perdre les intellectuels et que de nombreux jeunes sont aux prises avec des doutes. Pendant ce temps, de nombreux athées déclarés soulèvent de vives objections contre le théisme chrétien sur Internet, et de nombreux jeunes qui accèdent fréquemment à Internet n’ont pas pu trouver les réponses à ces objections dans leurs Églises. C’est dommage car il existe de nombreuses publications académiques de haute qualité dans lesquelles des réponses sont apportées à ces objections.19 Le problème est que, bien que de nombreux « sans religion » soient bien informés et instruits en science, ils ne sont pas bien informés sur la philosophie académique de la religion et les publications de théologie, qui sont si importantes pour comprendre la relation entre la science et le christianisme.

Un problème plus profond est celui de l’éducation théologique, où il existe encore une idée fausse largement répandue selon laquelle les philosophes David Hume et Immanuel Kant ont porté un coup fatal aux arguments en faveur de l’existence de Dieu au XVIIIe siècle. Les théologiens néo-orthodoxes tels que Karl Barth et de nombreux théologiens postmodernes sont d’accord avec cette évaluation. Ils ne savent pas que les objections de Hume et Kant ont été révélées comme fallacieuses par d’autres philosophes.20 Contrairement aux idées fausses populaires, Hume et Kant n’ont pas réussi à réfuter les arguments en faveur de l’existence de Dieu, tels que l’argument cosmologique, l’argument téléologique, l’argument moral et l’argument thaumaturgique (tiré des miracles). Ces arguments existent depuis des millénaires et, même à notre période scientifique actuelle, sont toujours défendus aujourd’hui dans des revues et des monographies publiées par des éditeurs universitaires de renommée mondiale tels que les presses universitaires de Oxford et Cambridge, Springer Nature et Routledge.

Tout en présentant des problèmes, Internet offre également un grand potentiel et des opportunités pour diffuser le contenu de ces ressources de haute qualité. Ces ressources académiques présentent des preuves et des arguments rigoureux (ainsi que des réponses détaillées aux objections à ces arguments) auxquelles il serait bon de sensibiliser les facultés de théologie, les Églises et les ministères auprès des étudiants universitaires, et leur apprendre à les utiliser. Les facultés de théologie, les Églises et les ministères étudiants universitaires doivent être sensibilisés à ces ressources académiques de haute qualité qui présentent des preuves et des arguments rigoureux (ainsi que des réponses détaillées aux objections à ces arguments) pour l’existence de Dieu, la résurrection et la divinité de Jésus-Christ, etc., et apprendre à les utiliser.

Le pluralisme religieux

En Inde, l’hindouisme est particulièrement opposé aux affirmations de vérité exclusivistes du christianisme. Il existe une longue tradition de l’idée d’incarnation dans la tradition Vaishnavite de l’hindouisme, et de nombreux hindous n’auraient aucun problème à voir Jésus avec Krishna, Bouddha et Gandhi comme des avatars de Vishnu (la Divinité). Néanmoins, le caractère unique et une-fois-pour-toutes de l’incarnation du Christ dans le christianisme est contraire à l’idée hindoue de la multiplicité des incarnations.21 Une défense du contexte monothéiste juif antique et des preuves historiques concernant l’origine de la christologie divine et de la résurrection22 est importante pour aider les gens à comprendre le caractère unique de la position chrétienne.

Parallèlement, il y a eu un mouvement appelant à l’inculturation de l’Évangile dans les termes, symboles et spiritualités asiatiques. Le point de vue de l’autre en tant que partenaire dans le dialogue interreligieux est devenu un mode de rencontre de premier plan, et certains théologiens asiatiques sont allés plus loin et ont plaidé pour que les écrits anciens hindous, bouddhistes, confucéens et/ou shintoïstes soient considérés comme l’« Ancien Testament » des chrétiens asiatiques.23 Le danger de telles approches est qu’elles peuvent entraîner de la confusion (puisque les termes, symboles et pratiques sont étroitement associés à un réseau de croyances païennes) et des compromis. Les hérésies ont augmenté en Corée, en Chine (illustrées par le Christ féminin du culte oriental de la foudre) et dans d’autres pays d’Asie.

Si l’Écriture affirme que certaines vérités peuvent être trouvées dans d’autres religions et philosophies à la suite de la révélation générale (Actes 14.17, 17.28), elle met également en garde contre la déformation et la suppression de la vérité entraînant le péché d’idolâtrie (Romains 1.18–25). « Ce qu’il faut donc, c’est le développement d’une théologie pleinement satisfaisante de la pluralité culturelle et religieuse, par opposition à celle du pluralisme religieux, qui prend au sérieux le caractère distinctif chrétien et biblique d’une part, et reconnaît à la fois le mal et la bonté dans les cultures humaines et les activités religieuses d’autre part. »24 On s’attend à ce que l’apologétique continue à jouer un rôle important pour les communautés chrétiennes alors qu’elles cherchent à discerner la vérité de l’erreur et à remplir le Mandat missionnaire.

Dans les contextes africains, la vérité n’est pas nécessairement analysée mais plutôt vécue à travers les traditions orales et les récits de la communauté. Cela signifie qu’en raison de liens de parenté étroits, remettre en question les normes acceptées ferait honte à un individu. En outre, les visions du monde africaines ont déjà une sous-structure du monde divin et spirituel. Dans un tel contexte, beaucoup prétendent croire en « Dieu » et les remises en question critiques de certaines des hypothèses au sein des religions traditionnelles africaines à la lumière du trinitarisme chrétien peuvent être rares, car l’existence de Dieu est considérée comme allant de soi.25 Le philosophe de la religion John Mbiti, par exemple, note que bien que beaucoup se convertissent au christianisme et à l’islam, ils « sortent de la religion africaine mais ils n’enlèvent pas leur religiosité traditionnelle. »26 Cela signifie que l’apologétique chrétienne parmi les traditionalistes africains doit non seulement s’adresser aux idées intellectuelles, mais être contextualisée dans les liens de parenté qui maintiennent les sociétés africaines ensemble. Cependant, les conceptions de « Dieu » dans les religions traditionnelles africaines ainsi que certaines pratiques culturelles présentent un problème de syncrétisme lorsqu’il s’agit de la vérité objective27.

Les contextes africains sont majoritairement fondés sur des traditions orales par lesquelles la vérité est explorée et vécue à travers des proverbes, des chansons, des mythes et des histoires. Cela signifie que des cadres plus analytiques pour tester les affirmations de vérité semblent étrangers à une majorité d’Africains dont la vision du monde est influencée par les traditions orales, le respect de l’autorité, la puissance du monde des esprits, ainsi que la honte et l’honneur dans le contexte de la communauté. Le sujet de la vérité objective sera donc important pour l’Église qui cherche à interagir efficacement avec les générations montantes d’Africains qui naviguent dans les réalités de la mondialisation et les objections opposées à la foi chrétienne.

Étant donné que les jeunes représentent 60 % de la population africaine et que la population du continent aura triplé d’ici 2050 selon le Forum économique mondial, une compréhension claire de l’Évangile est essentielle.28 Répondre aux enjeux intellectuels complexes sur le continent africain nécessitera une solide formation en apologétique. Un tel fondement aidera les chrétiens à critiquer avec compassion et sincérité les arguments soulevés contre la foi chrétienne, à récupérer les preuves historiques de la foi chrétienne comme innée au continent et à ancrer solidement les nouveaux chrétiens dans une vision du monde biblique et un cadre qui les protège et les responsabilise dans les réalités surnaturelles et spirituelles volatiles de la grande guerre du cosmos. L’accomplissement du Mandat missionnaire est nécessaire à la fois parmi les divers groupes de personnes les moins atteintes (Least Reached People – LRP), mais aussi dans la population croissante de jeunes qui s’identifient comme non religieux. Après tout, l’Église est le pilier de la vérité, dans un monde qui nie la vérité.

Conclusion

En conclusion, la vérité objective est confrontée à plusieurs objections dans le monde moderne, notamment la subjectivité et le relativisme, l’individualisme expressif, le biais de confirmation, la propagation rapide de la désinformation, la prétendue opposition entre science et christianisme, et le pluralisme religieux. Bien que ces objections puissent entraver l’arrivée à une compréhension commune de la vérité, il est important de continuer à rechercher l’objectivité et la rationalité dans notre pensée et notre discours. C’est en reconnaissant ces difficultés et en nous efforçant de les surmonter que nous pourrons maintenir notre engagement en faveur de la recherche de la vérité et de la connaissance.

Ressources

  • Andrew Loke, Investigating the Resurrection of Jesus Christ: A New Transdisciplinary Approach. (London: Routledge, 2022).
  • Andrew Loke, The Teleological and Kalām Cosmological Arguments Revisited. (Cham, Switzerland: Springer Nature, 2022).
  • James Porter Moreland and William Lane Craig, Philosophical Foundations for a Christian Worldview. (Downers Grove, Ill: InterVarsity Press, 2017).
  • Jerry Walls and Trent Dougherty, Two Dozen (or so) Arguments for God. (Oxford: Oxford University Press, 2018).

Notes

  1. Dwayne H. Mulder, ‘Objectivity,’ The Internet Encyclopedia of Philosophy. Consulté le 30 mai 2023. iep.utm.edu.
  2. Maria Baghramian and J. Adam Carter, ‘Relativism,’ The Stanford Encyclopedia of Philosophy (Spring 2022 Edition), Edward N. Zalta (ed.). Consulté le 30 mai 2023. https://plato.stanford.edu/archives/spr2022/entries/relativism/.
  3. Kevin Muriithi Ndereba, ‘Apologetics in a Digital Age: Incarnating the Gospel for African Next Gens,’ Global Missiology, Vol 18, No 4 (2021): 24-32.
  4. Stephen Hawking, The Grand Design (New York: Bantam Books, 2010), 5.
  5. Andrew Loke, The Teleological and Kalam Cosmological Arguments Revisited (Cham, Switzerland: Springer Nature, 2022), chapter 1.
  6. ‘Word of the Year,’ Oxford Languages. Consulté le 30 mai 2023. https://languages.oup.com/word-of-the-year/2016/.
  7. ‘Word of the Year,’ Oxford Languages, 2023.
  8. Quelques statistiques récentes sur le discipulat et le doute:
  9. C.S. Lewis, The Weight of Glory (New York : Harper Collins, 1980), 59.
  10. Mark Sayers, Disappearing Church (Chicago, Moody Press, 2016), 17. Cité dans Trevin Wax, ‘Expressive Individualism: What Is It?’ Consulté le 30 mai 2023. https://www.thegospelcoalition.org/blogs/trevin-wax/expressive-individualism-what-is-it/.
  11. » R. C. Sproul, The Consequences of Ideas: Understanding the Concepts that Shaped our World (Wheaton, IL: Crossway, 2000), 179.
  12. Dans le contexte kenyan, il y a eu divers appels à l’éthique sexuelle conservatrice qui sous-tend la constitution du Kenya. Ces appels ont ciblé l’article 162 de la constitution, et ont été alimentés par des groupes de défense des droits des LGBTIQAA + avec un financement important par des organisations occidentales. Dans le contexte de l’Église, plusieurs communions de l’Église africaine, invoquant une éthique sexuelle biblique, se sont distanciées de leurs homologues mondiales qui prônent une éthique sexuelle progressiste.
  13. ‘Confirmation Bias,’ Ethics Unwrapped. Consulté le 30 mai 2023. https://ethicsunwrapped.utexas.edu/glossary/confirmation-bias.
  14. Ray Yeo, à paraître, ‘Christian Higher Education in a Healthy Secularism: Repositioning Secularism, Faith, and Christian Education for Mutual Flourishing,’ dans Who Is My Neighbour? Christian Higher Education in a Secular Age, sous la direction de Joy Demoskoff et Matthew Zantingh (non publié).
  15. Kevin Muriithi Ndereba, ‘Emerging Apologetics Themes in Contemporary African Youth Ministry: A Kenyan Perspective,’ Stellenbosch Theological Journal vol. 8, no. 2 (2022): 1-18.
  16. Steve Wilkens and Mark L. Sanford, Hidden Worldviews: Eight Cultural Stories that Shape our Lives (Downers Grove: IVP Academic, 2009), 111-116.
  17. Kevin Muriithi Ndereba, ‘Faith, Science, and Nonreligious Identity Formation Among Male Kenyan Youth,’ Zygon: Journal of Religion and Science 58, no. 1 (2023): 45-63.
  18. Shaun Henson, ‘What makes a quantum physics belief believable? Many-worlds among six impossible things before breakfast,’ Zygon (2023) https://doi.org/10.1111/zygo.12872, page 19.
  19. Voir, par exemple, David Baggett and Jerry Walls, God and Cosmos: Moral Truth and Human Meaning (Oxford: Oxford University Press, 2016); Lewis, Geraint and Luke Barnes, A Fortunate Universe: Life in a Finely Tuned Cosmos (Cambridge: Cambridge University Press, 2016.); Andrew Loke, Investigating the Resurrection of Jesus Christ: A New Transdisciplinary Approach (London: Routledge, 2020). Accès libre, téléchargement gratuit ici: https://www.academia.edu/42985421/Investigating_the_Resurrection_of_Jesus_Christ; Andrew Loke, The Teleological and Kalam Cosmological Arguments Revisited (Cham, Switzerland: Springer Nature, 2022); Andrew Loke, The Origin of Humanity and Evolution: Science and Scripture in Conversation (London: T & T Clark, 2022); Richard Swinburne, The Existence of God, 2nd ed. (Oxford: Oxford University Press, 2004.); Walls, Jerry and Trent Dougherty, Two Dozen (or so) Arguments for God (Oxford: Oxford University Press, 2018).
  20. Voir, for exemple, Richard Swinburne, ‘Why Hume and Kant were mistaken in rejecting natural theology,’ in T. Bucheim et al ed., Gottesbeweise als Herausforderung fur die Moderne Vernunft, Mohr Siebeck, 2012: https://users.ox.ac.uk/~orie0087/pdf_files/Papers%20from%20Philosophical%20Journals/Swinburne_2012-hume-kant.pdf ) and William Lane Craig, ‘Kant’s First Antinomy and the Beginning of the Universe,’ Zeitschrift für Philosophische Forschung, 33 (1979): 553–567.
  21. M. Thangaraj, “Religious Pluralism, Dialogue and Asian Christian Responses,” in S. Kim (Ed.), Christian Theology in Asia (Cambridge: Cambridge University Press, 2008), 171-172.
  22. Andrew Loke, The Origins of Divine Christology (Cambridge: Cambridge University Press, 2017); Loke, Investigating the Resurrection of Jesus Christ.
  23. Thangaraj, 2008, 161-165.
  24. H. Yung, “Mission and evangelism: Evangelical and Pentecostal theologies in Asia,” in S. Kim (Ed.), Christian Theology in Asia (Cambridge: Cambridge University Press, 2008), 171-172.
  25. Kevin Muriithi Ndereba, « Analysing African Traditional Gods Through a Trinitarian Apologetic, » African Theological Journal for Church and Society 3, no. 2 (2022): 72-89.
  26. Cité dans Laurenti Magesa, African Religion: The Moral Traditions of Abundant Life (Nairobi: Pauline Publications Africa), 17.
  27. Kevin Muriithi Ndereba, « The Supremacy of Jesus Christ: A Theological response to the Resurgence of Mbũri cia Kiama, » African Theological Journal for Church and Society 2, no. 2 (2021): 40-57.
  28. Forum économique mondial, “The Children’s Continent: Keeping up with Africa’s Growth,” Jan 13, 2020. Consulté le 2 juin 2023. https://www.weforum.org/agenda/2020/01/the-children-s-continent/?DAG=3&gclid=CjwKCAjwpuajBhBpEiwA_ZtfhbrDnB-2AC9ytRhFifhnXxywM3xVNmzD_SCxnjpMcMBop_tyT3tzQxoCec4QAvD_BwE.

Biographies des auteurs

Andrew Loke

Le Dr Andrew Loke est professeur agrégé au Département de religion et de philosophie de l’Université baptiste de Hong Kong. Il est l’auteur de plusieurs livres publiés par des éditeurs universitaires de renommée mondiale dans les domaines de la théologie, de la philosophie, des études bibliques, de la science et de la religion. Il dirige le Hong Kong Centre for Christian Apologetics.

Kevin Muriithi Ndereba

Le Dr Kevin Muriithi Ndereba est chargé de cours et chef du département Département d’histoire, de mission, de religion et de théologie pratique à la St. Pauls University, Kenya. Il est chercheur en théologie pratique et missiologieà l’Université de Stellenbosch, Afrique du Sud. Il donne des conférences et a publié de nombreux articles sur l’apologétique, la pastorale des jeunes et la théologie pratique. Il dirige Apologetics Kenya.

Mary Jo Sharp

Mary Jo Sharp est professeure adjointe d’apologétique à la Houston Christian University au Texas, se concentrant sur la philosophie de la religion, le problème du mal, l’apologétique et l’évangélisation. Elle est conférencière internationale et auteure sur l’apologétique, publiée chez Kregel Publications, B&H Publications, Lifeway et Zondervan. Son ministère est Confident Christianity Apologetics Ministry.

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