Rapport régional de l’Afrique francophone

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Les grandes tendances mondiales qui façonnent le Mandat Missionnaire

L’essor de l’Afrique

Si l’on observe le taux d’évolution annuel moyen (2,76), l’Afrique devrait, d’ici 2050, avoir le pourcentage de chrétiens le plus élevé au monde et occuper une place prépondérante sur la scène chrétienne mondiale. La dernière édition de la World Christian Encyclopaedia atteste de la croissance rapide du christianisme en Afrique. Selon cette étude, 26 % des chrétiens vivent en Afrique, alors que l’Afrique représente environ 18 % de la population mondiale. Aujourd’hui, ce chiffre pourrait bien être revu à la hausse. Et la mission se poursuit, non plus par des agents étrangers européens ou américains, mais essentiellement par les acteurs africains eux-mêmes, alors que le monde des anciens acteurs se déchristianise, et que les nouvelles recompositions religieuses et les politiques religieuses étatiques (laïcité, interdiction du prosélytisme, etc.) semblent mettre à mal la dimension missionnaire de l’Église.

Dans le context du Mandat Missionnaire, nous devons maintenir la croissance du christianisme en Afrique et rentabiliser les acquis en mettant l’accent sur l’évangélisation, le discipulat des jeunes à tous les stades, et en cultivant une vision théologique intégrée qui consolidera les bénéfices de tous les efforts missionnaires d’évangélisation.1

Populations régionales de jeunes

Selon les Nations unies, le monde compte aujourd’hui plus de 1,8 milliard de jeunes, soit 16 % de la population mondiale, dont 90 % vivent dans les pays en développement. Le nombre d’adolescents et de jeunes atteint aujourd’hui un niveau record, même s’il devrait diminuer considérablement, passant de 17,6 % en 2010 à 13,5 % en 2050 si la fécondité mondiale continue de baisser.2

L’Afrique sera le continent le plus jeune du monde en 2022, avec 60 % de sa population âgée de 25 ans ou moins, contre une moyenne mondiale de 25 % et un âge médian de 19,7 ans. En outre, l’Afrique devrait connaître la plus forte croissance de la jeunesse, avec 42 % de sa population âgée de 15 à 24 ans d’ici à 2030. La jeunesse de la population africaine est peut-être son potentiel le plus stratégique pour le mouvement chrétien mondial.3

Le rapport « Global Youth Culture » de One Hope a montré que l’Afrique compte le plus grand nombre d’adolescents chrétiens engagés, soit 28 %, contre 17 % pour tous les autres continents réunis. Cela signifie que quiconque envisage la mission doit non seulement se demander comment l’Afrique est impliquée, mais aussi que les Africains eux-mêmes doivent être prêts à être à l’avant-garde de la force missionnaire, prêts à offrir au monde la plus grande force missionnaire.

Comme tout autre missionnaire interculturel, toute personne intéressée par la mission auprès des jeunes en Afrique doit être prête à étudier la culture des jeunes et les influences qu’elle exerce sur eux. C’est essentiel pour comprendre leur vision du monde, afin de leur communiquer l’Évangile et de les adopter dans la famille de la foi.

La jeunesse de la population africaine est peut-être son potentiel le plus stratégique pour le mouvement chrétien mondial.3

Pour conquérir les jeunes, nous devons d’abord entrer dans leur monde pour établir la confiance, l’attention et les relations. Les jeunes ne s’intéressent pas aux programmes, mais ont plutôt besoin de relations significatives avec des adultes attentifs. Ensuite, ils ont besoin d’un modèle incarné, d’une prédication de l’Évangile accompagnée d’exemples de vie chrétienne authentique, de l’application des principes bibliques dans la vie quotidienne, d’un modèle d’adultes vivant dans la foi, dans le cadre de relations authentiques et significatives. Enfin, c’est notre engagement dans les Écritures qui aidera les jeunes à se connecter à la Parole de Dieu et à la trouver pertinente dans leur situation. En tant que parents et adultes plus âgés, nous devons montrer l’exemple dans la manière dont nous interagissons avec la Parole de Dieu et accompagner nos jeunes dans la lecture, la méditation et l’application de ces paroles de vie.

Les jeunes sont confrontés à de multiples défis dans leur vie :

Des défis des médias sociaux

Internet représente la métaphore culturelle dominante du monde du 21e siècle – décentralisé, hautement participatif, fluide, auto-organisé, géographiquement dispersé.

Des défis en matière de santé mentale

L’isolement et le manque de contacts humains prouvent que la communauté est la clé de l’épanouissement humain. Il est donc vrai que la recherche de relations fait d’une pierre plusieurs coups (la connexion à Internet 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7 est l’un des principaux facteurs de l’isolement social qui nuit à la santé mentale des jeunes).

Des défis généraux

Ces défis comprennent l’extrême pauvreté, le changement climatique mondial, les abus sexuels, le chômage et la corruption politique. L’Église est appelée à relever les défis mondiaux au niveau de la jeunesse.

L’affect visuel et oral comme validation de la vérité

Les technologies numériques sont à l’origine de ce que beaucoup appellent la « nouvelle oralité ». Les applications bibliques permettent aux gens du monde entier d’entendre, plutôt que de lire, la Bible dans la langue de leur cœur. À cet effet, les organisations, les responsables d’Église et les partenaires impliqués dans le Mandat Missionnaire de notre Seigneur devraient saisir les nouvelles opportunités que représente la traduction orale de la Bible pour les communautés africaines dans leurs ministères d’évangélisation et d’appropriation de la Parole de Dieu dans les communautés. Il est urgent de faire connaître aux Églises le domaine de la traduction orale de la Bible (TAB). D’une part, pour montrer son importance pour le Mandat Missionnaire en Afrique francophone et, d’autre part, pour montrer la nécessité pour les Églises de s’impliquer dans le développement de projets de TAB dans les langues qui n’ont pas encore de Bible, et même dans celles où des projets sont en cours.

Intégrité et lutte contre la corruption

La promotion de l’intégrité, de la responsabilité et de la lutte contre la corruption est un aspect important de la mise en œuvre du Mandat Missionnaire en Afrique. La mission des Églises est de soutenir toutes les personnes impliquées dans la prévention de la corruption en développant une culture de l’intégrité. L’accent est mis sur la jeune génération afin qu’elle agisse de manière prospective et qu’elle rompe avec les schémas de corruption établis. Les jeunes sont un pilier de la société africaine. Ils sont les créateurs de l’avenir du pays, mais aussi les plus touchés par les faiblesses du système de gouvernance. Pour contribuer à une véritable culture de l’intégrité en Afrique, les éléments suivants seront nécessaires :

  • Développer une culture de l’intégrité chez les jeunes Africains en créant des groupes de dialogue innovants, en mettant en œuvre des mesures de sensibilisation et de prévention de la corruption auprès des jeunes pour renforcer l’intégrité, en créant des espaces de réflexion et en encourageant le débat et l’innovation.
  • Développer une vie d’intégrité, ou de cohérence, entre notre vie en général et les enseignements de Jésus : Les non-chrétiens justifient souvent leur refus de prendre la foi chrétienne au sérieux en soulignant le manque de cohérence entre notre vie en général et les enseignements de Jésus dans l’Église. L’incapacité des croyants à faire preuve d’intégrité, ou de cohérence, entre leur vie en général et les enseignements de Jésus rend l’Évangile moins crédible ; elle suggère que le fait de donner sa vie au Christ n’a pas l’impact transformateur que l’on prétend.

Les hommes et les femmes en partenariat

Dans le monde entier, les femmes sont plus nombreuses que les hommes à déclarer que le christianisme est « très important » pour elles. C’est particulièrement vrai dans les Amériques, en Asie et en Afrique. Dans certains cas, l’écart varie de 15 à 20 %.

L’un des fronts de l’engagement commun attendu pour la réussite du Mandat Missionnaire est le partenariat entre les hommes et les femmes. La présence des femmes doit contribuer à un style différent d’exercice de la responsabilité et du pouvoir. Il s’agit de valoriser le style de leadership des femmes, plus dynamique parce que plus relationnel, transformationnel et émotionnel ; plus interactif, encourageant la participation et stimulant la motivation ; orienté vers les tâches et les résultats en reliant les personnes et les objectifs ; un leadership sensible à la résolution des problèmes et des conflits ; une approche intégrée chez les femmes des différentes composantes de la personne : corps et esprit, affectivité et intellect.

Les défis du Mandat Missionnaire

Les communautés numériques et l’utilisation éthique des appareils/médias numériques dans le ministère pastoral.

Dans les cercles chrétiens, les responsables pastoraux s’inquiètent du fait que des outils tels que ChatGPT pourraient devenir une plateforme majeure de consommation de connaissances. Cependant, comme l’affirme à juste titre Jason Watson, « la formation spirituelle implique d’aller au-delà de la simple consommation de contenu sur l’Évangile pour permettre intentionnellement à la vérité de l’Évangile de changer notre façon de vivre » 4 Alors que beaucoup considèrent les progrès de l’IA comme une menace pour l’humanité, nous percevons que la confiance dans la providence de Dieu dans chaque vie chrétienne sera plus importante que jamais, parce que les conseils de Dieu ne peuvent pas être simplement remplacés par la génération d’informations. À cet égard, en tant que disciples de Christ, nous avons la responsabilité, d’ici 2050, d’éduquer tout le monde à l’utilisation éthique de la technologie.

L’immigration

Plus que par le passé, l’Afrique est en mouvement. Ce mouvement est physique (migrations choisies ou imposées par diverses situations sociopolitiques) ou culturel, avec des phénomènes de déculturation, d’hybridation culturelle ou de déplacement des valeurs (morales et familiales en l’occurrence). Il est aussi religieux, avec les recompositions religieuses et confessionnelles et les conflits référentiels qu’elles peuvent engendrer, tantôt avec les structures religieuses ancestrales, tantôt avec celles du christianisme et de l’islam. Le Mandat Missionnaire doit nécessairement se positionner dans cette mondialisation tantôt opportune, tantôt débridée. Le travail missionnaire doit prendre en compte les effets de la mondialisation sur le christianisme africain (positionnement des Églises traditionnelles, recompositions confessionnelles, effets des médias et des réseaux sociaux, déplacement des valeurs, accompagnement des personnes en migration, etc.)

Plus que par le passé, l’Afrique est en mouvement…. il est urgent de redéfinir la pratique de la mission dans ce contexte complexe, où les gens sont constamment en mouvement et se trouvent dans de nouvelles situations socio-religieuses avec leurs propres questions et défis spécifiques.

Dans ces conditions, il est urgent de redéfinir la pratique de la mission dans ce contexte complexe, où les gens sont constamment en mouvement et se trouvent dans de nouvelles situations socio-religieuses avec leurs propres questions et défis spécifiques. Il faut également tenir compte du fait que des régions traditionnellement non chrétiennes comme l’Afrique du Nord se retrouvent avec des populations migrantes chrétiennes, même si les pays de cette région ont l’islam pour religion officielle.

Le défi théologique, y compris le mouvement kémite

Ce mouvement valorise les racines culturelles et spirituelles africaines précoloniales et remet en cause le christianisme en Afrique sur plusieurs points de divergence idéologique et historique. Il formule plusieurs critiques à l’égard du christianisme sur le continent africain.

Tout d’abord, pour ce mouvement, le christianisme est une imposition coloniale en Afrique. Le christianisme est présenté comme un instrument du colonialisme européen, utilisé pour soumettre les peuples africains et effacer leurs cultures et spiritualités indigènes. Selon les kémites, l’introduction du christianisme en Afrique s’est souvent accompagnée de la destruction des traditions religieuses et culturelles locales. En conséquence, les kémites estiment que le christianisme a contribué à l’aliénation culturelle des Africains, en leur imposant des valeurs et des croyances étrangères, au détriment des traditions africaines ancestrales.

Deuxièmement, le mouvement kémite appelle à la valorisation des spiritualités africaines ancestrales. Il encourage la redécouverte et la réappropriation des spiritualités africaines ancestrales, telles que les croyances et les pratiques de l’Égypte ancienne (Kemet), considérées comme authentiquement africaines, et le rejet de l’universalité et de la supériorité présumées du christianisme, affirmant que chaque culture a ses propres systèmes de croyance valables et que les spiritualités africaines méritent une reconnaissance égale.

Troisièmement, le mouvement kémite remet en question les récits bibliques et historiques, en particulier ceux qui dépeignent l’Afrique et les Africains sous un jour négatif. Il propose une relecture de l’histoire religieuse et spirituelle de l’Afrique, en mettant en lumière les personnages et les événements qui ont été marginalisés ou déformés. Ils revendiquent également l’héritage des anciens Égyptiens, qu’ils considèrent comme des Africains noirs, et critiquent les tentatives de blanchiment de cette histoire par les récits occidentaux.

Quatrièmement, le mouvement kémite blâme les pratiques missionnaires historiques, qui ont souvent dénigré les croyances locales et imposé une vision occidentale du monde, et remet en question les structures hiérarchiques de l’Église chrétienne, considérées comme non démocratiques et imposées de l’extérieur, par opposition aux structures communautaires plus horizontales des sociétés africaines traditionnelles.

Cinquièmement, les kémites promeuvent une conscience afrocentrique en encourageant les Africains à redéfinir leur identité en dehors des cadres imposés par les religions abrahamiques, y compris le christianisme, à retrouver une autonomie culturelle et spirituelle et à promouvoir une éducation qui mette en valeur l’histoire et les contributions africaines et qui remette en question les récits historiques eurocentriques dominants.

Tout missionnaire interculturel, toute personne intéressée par la mission auprès des Africains, doit être sensible à ces critiques culturelles et théologiques du mouvement kémite.

La transformation des matières premières africaines, cause de conflits et de non-développement

L’Église en Afrique aura un réel impact sur les sociétés africaines si elle réfléchit à la recherche de solutions durables à la dépendance excessive des ressources africaines qui a conduit à des économies volatiles, à une faible industrialisation, à des problèmes de gouvernance et à une incapacité à s’adapter aux changements mondiaux tels que la transition énergétique. En outre, il est crucial de souligner que la richesse future réside davantage dans le développement des capacités humaines, technologiques et institutionnelles que dans l’exploitation brute des ressources naturelles. Le Mandat Missionnaire pourrait travailler sur ces points majeurs :

La volatilité du prix des matières premières

  • L’instabilité des marchés : Les prix des matières premières telles que les huiles, les métaux précieux et les minerais sont extrêmement volatils. Cette instabilité rend difficile la planification économique à long terme et la création de richesses stables.
  • La dépendance à l’égard d’un marché mondial instable : Les économies africaines fortement dépendantes des exportations de matières premières sont vulnérables aux chocs extérieurs, tels que les fluctuations des prix mondiaux, qui peuvent rapidement réduire les revenus.

Une faible valeur ajoutée et une industrialisation limitée

  • L’absence de transformation locale : Une grande partie des matières premières africaines sont exportées non transformées, ce qui signifie que la majeure partie de la valeur ajoutée est générée ailleurs. Cela limite les possibilités de développement industriel et de création d’emplois dans le pays.
  • Un faible développement industriel : Le manque d’infrastructures et de capacités technologiques pour transformer les matières premières localement empêche de capter une plus grande part de la chaîne de valeur.

Les rentes et la malédiction des ressources

  • Les rentes économiques et la corruption : La richesse en ressources naturelles a souvent conduit à des formes de gouvernance fondées sur la rente, où les élites captent les revenus sans redistribuer équitablement les bénéfices, ce qui conduit à la corruption et à l’inégalité.
  • La malédiction des ressources : Ce phénomène décrit la tendance des pays riches en ressources à avoir une croissance économique plus lente, des conflits internes et des institutions politiques faibles, par rapport aux pays moins riches en ressources.

La transition écologique et les économies fondées sur la connaissance

  • La transition énergétique mondiale : Avec la transition mondiale vers les sources d’énergie renouvelables, la demande de certains combustibles fossiles et minéraux pourrait diminuer, ce qui affecterait les exportateurs africains de pétrole et de gaz.
  • L’importance croissante des économies de la connaissance : au XXIe siècle, les économies les plus dynamiques sont de plus en plus axées sur l’innovation, la technologie et les services. Les matières premières ne suffisent pas à générer une croissance économique durable.

Les questions environnementales et sociales

  • La dégradation de l’environnement : L’extraction des matières premières entraîne souvent des dommages environnementaux importants, qui peuvent affecter l’agriculture, la santé publique et la biodiversité.
  • Les conflits et les déplacements de population : L’exploitation des ressources naturelles est parfois liée à des conflits violents et à des déplacements forcés de population, ce qui exacerbe les tensions sociales et entrave le développement durable.

La pauvreté et l’inégalité d’accès à la richesse

Environ 700 millions de personnes vivent encore dans l’extrême pauvreté (dont un enfant sur cinq). Les principaux indicateurs de pauvreté, qui couvrent la santé, l’éducation et le niveau de vie, révèlent qu’une personne pauvre dans une partie du monde n’est pas démunie de la même manière qu’une personne pauvre dans une autre région. Cette inégalité des revenus reste un défi pour le travail missionnaire, et de nombreuses personnes continuent à vivre dans la pauvreté.

Pour réduire la pauvreté et les inégalités d’accès aux richesses, nous proposons un certain nombre de solutions :

  • Comprendre la complexité de la pauvreté pour trouver des solutions. Nous ne pouvons pas résoudre un problème que nous ne pouvons pas voir ou comprendre. Nous devons investir notre temps et nos ressources pour mieux comprendre la dynamique de la pauvreté, tant au niveau mondial que dans nos propres communautés, et nous devons doter nos membres de cette compréhension par le biais d’une formation en micro et macro-entreprise.
  • Créer des mesures de succès basées sur des modèles analytiques.
  • Analyser les questions climatiques et répondre aux attentes qu’elles suscitent, plutôt que de les politiser : L’une des contributions de Lausanne dans ce domaine est la mise à disposition de son Creation Care Issue Network, qui rassemble des chrétiens du monde entier.
  • Collaborer pour réduire les redondances et les objectifs contradictoires : Grâce au développement rapide des nouvelles technologies, l’Église peut élaborer des informations pertinentes et opportunes pour soutenir la prise de décision. Cela nous permet non seulement de comprendre la crise, mais aussi d’évaluer la meilleure approche et d’identifier les partenaires potentiels.

Le Mandat Missionnaire et la théologie contextuelle

La vigueur future du christianisme en Afrique en général, et en Afrique francophone en particulier, dépendra énormément du type de théologie par rapport à la mission de l’Église dans le monde. Face aux défis des religions africaines traditionnelles, du sécularisme, de la géopolitique mondiale et du pluralisme religieux, une théologie africaine qui n’est ni missionnaire ni contextuelle par essence ne peut garantir un avenir radieux au christianisme africain. La question qui demeure est celle de connaître la réaction des théologiens africains eux-mêmes, ainsi que la signification et le degré de leur implication personnelle dans le processus d’élaboration des cadres théoriques et conceptuels correspondants.

L’idée clé est que notre foi doit avoir un impact sur la communauté ou la société. Le résultat de notre foi doit également conduire à la transformation de notre communauté. Il ne doit pas s’agir uniquement de « moi », mais aussi de « ma communauté ». On ne peut pas comprendre qu’un pays dont 60 % ou plus de la population est chrétienne soit un endroit où l’injustice, la corruption, le tribalisme, la violence, le génocide, etc. deviennent une réalité. Nous devrions donc insister davantage sur le fait que :

  • Le Dieu de notre foi doit transformer notre communauté ;
  • Notre Bible doit transformer notre communauté ;
  • Notre salut doit être une preuve de la transformation de notre communauté ;
  • Notre vie et notre responsabilité chrétiennes doivent conduire à la transformation de notre communauté.

Par conséquent, la question cruciale est la suivante : quel est l’impact de l’Évangile sur notre relation avec Dieu, avec nous-mêmes, avec les autres et avec le reste de la création ? Lorsque vous voyagez dans de nombreux endroits en Afrique, vous remarquerez que dans de nombreux cas, les gens attendent que l’Église soit la solution, mais la réalité est parfois un scénario différent.

Le besoin de foi chrétienne en Afrique n’est pas seulement théorique, mais aussi pratique. Dans l’énoncé du Mandat Missionnaire, Jésus parle de « leur enseigner à observer tout ce que je vous ai prescrit » (Mt 28,19).

Dans de nombreux endroits, l’Évangile a pour but de préparer les gens au paradis, à l’avènement du royaume de Dieu. L’accent est mis davantage sur la prière que sur le travail. Par conséquent, la théologie, qu’elle soit évangélique ou non, devient un instrument d’aliénation au lieu de conduire à la solution des besoins ressentis. Si Dieu ne se préoccupe pas des croyants, il devient plus facile de chercher un autre qui s’en préoccupe.

Le besoin de foi chrétienne en Afrique n’est pas seulement théorique, mais aussi pratique. Dans l’énoncé du Mandat Missionnaire, Jésus parle de « leur enseigner à observer tout ce que je vous ai prescrit » (Mt 28,19).

Il faut une théologie évangélique contextuelle plutôt qu’une théologie évangélique contextualisée. Mais l’évangélisme en Afrique doit éviter le piège des théologies trompeuses, provenant des théologies occidentales et des religions traditionnelles africaines. Il est nécessaire de faire participer les femmes et les jeunes à l’engagement théologique.

References

  1. Agayi, Marc Kodjo. Engagement Politique des Chrétiens Dans les Pays Francophones d’Afrique de l’Ouest (1990–2005). Thesis. Université de Strasbourg, 2010.
  2. Ahoga, Cossi Augustin, ed. Du Temple à la Cite, Quand l’Eglise Africaine Pense le Développement. (Cotonou, Bénin: Presses Bibliques Africaines, 2019).
  3. Audéoud, Martine. ‘Perspectives Sur la Théologie du Travail en Afrique Francophone’. Intervention à la Conférence Internationale de Recherches Interdisciplinaires 1959–2019: 60 ans des études théologiques en Afrique francophone—Tendances actuelles et perspectives d’avenir, Kinshasa, 19-21 Novembre 2019.
  4. Fallut, Mélanie Soiron. ‘Les églises de réveil en Afrique centrale et leurs impacts sur l’équilibre du pouvoir et la stabilité des Etats : le cas du Cameroun, du Gabon et de la République du Congo.’ Libreville : Ministère de la Défense, Délégation aux Affaires stratégiques, 2012.
  5. Gitau, Wanjiru, Seyram Amenyedzi & Fohle Lygunda. ‘Essor de l’Afrique’. In https://lausanne.org/fr/report/quest-ce-que-le-christianisme-polycentrique/essor-de-lafrique. Accessed 29 July 2024.
  6. Kenmogne, Michel et Pohor Rubin (sous dir.). ‘Vivre l’Evangile en contexte.’ Abidjan : Conseil des Institutions Théologiques d’Afrique Francophone et Initiative Francophone, 2021.
  7. Lygunda li-M, Fohle. Contextualisation aujourd’hui : Questions approfondies en théologie contextuelle. (Kinshasa: F Legacy Publishing, 2023).
  8. Niyigena, Jean-Paul, ‘Global Christianity in the Context of Africa. Historical Point of View and Challenges’. In Globale Christentüner.(Leiden:Brill Publishers, 2022). p. 289-306. DOI: https://doi.org/10.30965/9783657708390_015

Endnotes

  1. Wanjiru Gitau, Seyram Amenyedzi, & Folhe Lygunda, ‘Essor de l’Afrique’, in https://lausanne.org/fr/report/quest-ce-que-le-christianisme-polycentrique/essor-de-lafrique , accessed 29 July 2024.
  2. Ana Lucia Bedicks, Menchit Wong & Maggie Gathuku, « Populations Régionales De Jeunes », in https://lausanne.org/fr/report/quelles-sont-les-donnees-demographiques-emergentes/populations-regionales-de-jeunes, accessed 28 July 2024.
  3. PROGRAMME DES NATIONS UNIES POUR LE DÉVELOPPEMENT CENTRE DE SERVICES RÉGIONAL POUR L’AFRIQUE (2023). Les Jeunes en Afrique : un Impératif Démographique pour la Paix et la Sécurité Corne de l’Afrique, Grands Lacs et région du Sahel, In https://www.undp.org/sites/g/files/zskgke326/files/2023-05/undp-africa-youth-in-africa-2023-FR_0.pdf, accessed 28 july 2024.
  4. Jason Watson, « ChatGPT pourrait-il faire des disciples ? Repenser le discipulat évangélique à la lumière de l’IA », in https://lausanne.org/fr/qui-nous-sommes/blog-fr/chatgpt-pourrait-il-faire-des-disciples, 9 February 2023, accessed 28 July 2024, p.14.

Biographies des auteurs

Fohle Lygunda

Fohle Lygunda est le fondateur et le directeur général du Centre africain d’études interdisciplinaires (CAEI) à Kinshasa, en République démocratique du Congo. Il est titulaire d’un doctorat en missiologie de l’Université du Nord-Ouest, à Potchefstroom, en Afrique du Sud, et d’un doctorat en théologie du Séminaire théologique d’Asbury. Il est l’auteur de Transforming Missiology: An Alternative Approach to Missiological Education (Langham, 2018).

Rubin Pohor

Le Dr Rubin Pohor est professeur à l'université Alassane Ouattara, à Bouaké, Côte d'Ivoire. Il est également vice-président en charge des méthodes d'enseignement, de la recherche et des publications à l'Université de l'Alliance Chrétienne d'Abidjan (UACA) et chef de son département des sciences humaines. Il est coordinateur du Conseil des Institutions Théologiques d'Afrique francophone.

Cossi Augustin Ahoga

Dr Cossi Augustin Ahoga né à Logozohê (Bénin), est un théologien, économiste et anthropologue. Il a étudié à l'Université nationale du Bénin, à Vaux-Sur-Seine en France, à Gloucestershire en Angleterre et à SATS en Afrique du Sud. Il a travaillé à l'UGB pendant 32 ans et a dirigé les Presses Bibliques Africaines (PBA) pendant 12 ans. Il est aujourd'hui chercheur et président du Laboratoire interdisciplinaire des réalités endogènes (LIRE-Afrique). Il a été l'éditeur du premier ouvrage de référence publié par PBA, From the Temple to the City: When the African Church Thinks About Development, paru en 2019.

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