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Lausanne et l’Evangélicalisme Mondial: Caractéristiques Théologiques et Impact Missiologique

Timothy C. Tennent 25 Juil 2014

Cet article apparait comme un chapitre dans le livre de Regnum Books ‘The Lausanne Movement: A Range of Perspectives (Oxford: Regnum Books, 2014)’, et est publié ici avec permission. L’auteur écrit ici en tant que personne physique et ses points de vue ne reflètent pas nécessairement ceux du Mouvement de Lausanne. En savoir plus sur le livre écrit par Regnum.

Le Comité de Lausanne pour l’Evangélisation du Monde (LCWE), largement connu sous le nom de Mouvement de Lausanne, est un Mouvement évangélique mondial qui est issu du Congrès International sur l’Evangélisation Mondiale en 1974. Cet événement a connu la participation d’environ 2700 délégués de plus de 150 pays à Lausanne. Organisé par Billy Graham et John Stott, le Mouvement de Lausanne est responsable de plusieurs consultations stratégiques mondiales dont l’évènement de 1974 à Lausanne, aussi bien que des évènements majeurs à Manille (1989) et à Cape Town en Afrique du Sud (2010). Le but de ce chapitre est d’explorer les caractéristiques théologiques clefs du Mouvement de Lausanne aussi bien que son impact missiologique. Le chapitre commencera avec une analyse des caractéristiques théologiques clefs, suivi d’une exploration de l’impact missiologique plus large qu’a le Mouvement dans son entièreté.

Caractéristiques Théologiques du Mouvement de Lausanne

L’un des héritages théologiques les plus durables du Mouvement de Lausanne a été les documents, la Déclaration de Lausanne, le Manifeste de Manille et l’Engagement du Cap qui définit les caractéristiques théologiques du Mouvement. [109] La Déclaration de Lausanne est largement perçue comme l’un des documents théologiques les plus importants au sein du mouvement évangélique. Lors d’une cérémonie émouvante à la fin du Congrès de Lausanne sur l’Evangélisation Mondiale en 1974, Billy Graham, en compagnie des leaders clefs de l’Eglise mondiale ont signé le document qui a rapidement circulé dans le monde entier. En quelques années, le document est devenu la confession de foi qui sert de guide à d’innombrables églises, mouvements Chrétiens, écoles théologiques et organisation missionnaires dans le monde entier.

La Déclaration de Lausanne contient 15 articles qui définissent les caractéristiques théologiques importantes. Chacune des affirmations clefs du document sera maintenant explorées

Le dessein de Dieu (Article 1)

Le premier Article, titré Le Dessein de Dieu, affirme que le Dieu Trinitaire est un Dieu missionnaire qui nous a appelés à participer avec joie à la mission rédemptrice du monde. Il cherche à clarifier que la mission concerne d’abord et avant tout Dieu et son dessein et son initiative de rédemption dans le monde, entièrement en marge de toutes action, ou tâches ou stratégies ou initiatives que l’Eglise entreprend. Pour être clair, la mission concerne beaucoup plus Dieu et qui Il est que nous et ce que nous faisons. En bref, la mission n’est pas prioritairement un sous-ensemble de la doctrine de l’Eglise qui cherche à grandir et étendre sa sphère d’influence dans le monde. Elle est plutôt l’histoire de l’action rédemptrice de Dieu dans le monde qui précède la vie de l’Eglise. Le document déclare : « Il a appelé du milieu du monde un peuple qui lui appartient et il l’a envoyé dans le monde pour servir et témoigner, pour faire avancer son règne, édifier le corps de Christ et glorifier son nom. ». Il est vrai, nous reconnaissons que Dieu a appelé son Eglise à pleinement prendre part à sa miss ion par le biais d’actes spécifiques d’obéissance, de proclamation et de service dans le monde, mais ceci doit tirer sa source du plus grand cadre de la mission de Dieu. Ceci permet à l’Eglise d’éviter le triomphalisme et de maintenir notre témoignage centré sur Dieu.

Autorité et Puissance de la Bible (Article 2)

Le deuxième article souligne une autre caractéristique théologique majeure du Mouvement de Lausanne, à savoir, le rôle central de l’Ecriture dans l’évangélisation du monde. Le Mouvement de Lausanne affirme l’inspiration divine, la véracité et l’autorité des Ecritures de tant l’Ancien que le Nouveau Testament dans leur entièreté en tant que la Parole de Dieu, « Il n’y a point d’erreur dans tout ce qu’elle affirme. Elle est la seule parole écrite de Dieu et l’unique règle infaillible de foi et de vie. » [110]. La valeur de cette affirmation est qu’elle évite deux problèmes potentiels qui ont quelquefois négativement influencé la façon dont l’Eglise a compris l’Ecriture. D’une part, le Mouvement de Lausanne se tient fermement (en ligne droite) avec le grand courant historique de la foi Chrétienne en affirmant la puissance et l’efficacité de la Parole de Dieu. Le fait d’avoir manqué de rester ferme sur l’autorité de l’Ecriture est à la base de nombre de déclins au sein de différentes branches de l’Eglise. D’autre part, il est important de reconnaître que la puissance de l’Ecriture est basée sur Dieu Lui-même. Ceci n’entache pas le fait que la Parole de Dieu telle que nous l’avions reçue est sans erreur et est par conséquent vraie. Mais nous devons aussi nous rappeler que nous lisons et proclamons l’Ecriture dans la présence du Christ ressuscité Lui-même et en continuité avec l’Eglise vivante à travers les âges. Les Ecritures sont « Inspirées de Dieu » et par conséquent découle de sa divine autorité en tant que Seigneur du monde et de l’Eglise, qui est sont Corps.

L’Unicité et l’Universalité de Christ (Article 3)

La troisième caractéristique théologique majeure du Mouvement de Lausanne est le caractère central de Jésus Christ qui est la seule « rançon pour les pécheurs », et le « seul médiateur entre Dieu et les hommes ». Lausanne affirme l’unicité de Jésus Christ qui seul est mort pour nos péchés. [111] La Déclaration de Lausanne rejette la notion que Dieu parle également à travers toutes les religions ou que les autres religions peuvent en fin de compte amener tout le monde au Salut en Christ. En lieu et place, l’Eglise est appelée à proclamer à toute la race humaine la puissance de Christ, et à appeler tous les hommes et toutes les femmes à se repentir de leurs péchés et placer leur foi et leur confiance en Jésus Christ de façon explicite. Le Mouvement de Lausanne rejette donc aussi bien l’universalisme traditionnel que diverses formes Christocentriques d’universalisme (telles que l’inclusivisme) en insistant non seulement sur la suprématie de Jésus Christ, mais aussi sur l’importance de l’appel à une repentance claire et de la foi en Jésus Christ pour le salut.

La Nature de l’Evangélisation/Eglise et Evangélisation (Articles 4 et 6)

Le Mouvement de Lausanne est fondamentalement un réseau de Chrétien engagés pour l’évangélisation du monde. Ceci ne veut pas dire que nous espérons que chaque personne dans le monde réponde à l’Evangile, mais que c’est notre devoir sacré de nous assurer que chaque groupe ethnique du monde ait l’opportunité d’entendre l’Evangile et de voir le témoignage vivant de l’Evangile vécu à travers le témoignage de l’Eglise. Pendant que le quatrième article se concentre sur l’évangélisation, le sixième article affirme clairement que la tâche de l’évangélisation du monde est centrée sur l’Eglise. En effet, le document proclame que « l’Eglise est au centre de l’objectif de Dieu pour le monde et elle est le moyen qu’Il a choisi pour propager l’Evangile ». Quelquefois, l’Eglise est vue comme n’étant destinée qu’à être un instrument dans le monde, allusion faite au travail de proclamation de l’Evangile. Cependant, la vision du Mouvement de Lausanne est que l’Eglise a un objectif ontologique plus profond et est intégralement liée à la consommation finale du Royaume. [112] En d’autres termes, ce n’est pas seulement que l’Eglise est l’instrument par lequel Dieu proclame l’Evangile; elle est plutôt ce que Dieu est en train de construire dans le monde. L’Eglise ne doit pas être assimilée au Royaume, mais le Royaume n’est pas consommé loin du peuple racheté de Dieu qui a été appelé d’une vie de péché pour la communion avec l’Eglise, la compagnie des rachetés. L’Eglise ne fait pas que proclamer la puissance de la croix, elle est appelée elle-même à « porter les marques de la croix ».L’Evangile n’est pas simplement un ensemble de mots qui forment un message indépendant, c’est un message qui est, en fait, porté par une communauté de foi vivante dans le monde entier. Ainsi, l’Eglise n’est pas simplement un ramassis d’assemblage d’individus rachetés ou, encore moins, la sommes de toutes les institutions ecclésiales dans le monde entier, mais elle est fondamentalement, « la communauté du peuple de Dieu » qui transcende toutes cultures, tous systèmes sociaux et politiques et toutes idéologies.

La Responsabilité sociale du Chrétien / Liberté et Persécution
(Articles 5 et 13)

Le Mouvement de Lausanne a amené le mouvement évangélique mondial à écouter la voix de plusieurs Chrétiens du monde entier qui pensent que l’Eglise n’a pas été suffisamment solidaire vis-à-vis de ceux qui ont été privés de justice et marginalisés de diverses manières. Ainsi, le Mouvement de Lausanne affirme le souci de Dieu pour la justice et la libération de toutes formes d’oppressions. A des moments donnés, l’Eglise a eu de difficultés à définir le rapport entre l’évangélisation et l’ouvre sociale dans le monde. L’engagement à proclamer l’Evangile a parfois été réduite aux campagnes d’évangélisation sans un souci concomitant pour les pauvres, les sans-abris et les laissés-pour-compte. L’Eglise a reconnu le témoignage vibrant de Billy Graham et de Mère Térésa, par exemple, mais n’a pas toujours su comment les deux témoins sont liés l’un à l’autre. Certains évangéliques voient l’œuvre sociale comme un pont pour l’évangélisation. D’autres la conceptualisent comme étant la conséquence naturelle de l’évangélisation. Cependant, d’autres essayent de voir les deux comme des partenaires complémentaires. [113]

Il y a trois caractéristiques principales du Mouvement de Lausanne qui méritent d’être ressorties. D’abord, il place bien l’œuvre sociale dans un contexte sociologique, la rattachant aux doctrines de Dieu, de la réconciliation, de la justice, et au fait que tous les hommes et toutes femmes soient créés à l’image de Dieu. Ensuite, La déclaration affirme que l’évangélisation et l’œuvre sociale ne sont pas « mutuellement exclusives », posant ainsi les fondements pour une vision intégrée de comment la personne et l’œuvre de Christ sont reflétées dans la vie et le témoignage de l’Eglise. Enfin, au cœur de la Déclaration de Lausanne se trouve une expression de metanoia, ou repentance, pour le fait que l’Eglise ait manqué de vivre constamment avec le témoignage biblique à l’œuvre sociale et à la lutte pour la justice au nom des oppressés.

Le Mouvement de Lausanne s’est aligné théologiquement avec la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme. Il est important de reconnaître qu’on n’a pas besoin d’œuvre sociale que pour le monde des non croyants, mais aussi pour les millions de Chrétiens qui sont injustement emprisonnés et qui sont en train de subir la persécution. La Déclaration de Lausanne affirme combien il est important de faire face tant aux expressions personnelles du mal qu’aux maux structurels qui privent des millions de personnes de la liberté de religion.

Coopération dans l’Evangélisation et Eglises en Partenariat pour l’Evangélisation (Articles 7 et 8)

L’un des grands traits distinctifs du Mouvement de Lausanne est son désir de transcender les problèmes qui ont divisé l’Eglise et trouver notre plus profonde unité dans le noyau que constitue le message de l’Evangile. Le Mouvement de Lausanne est à la fois aussi bien un mouvement évangélique qu’un mouvement profondément œcuménique. En tant que membre du mouvement œcuménique, Lausanne se tient dans la tradition de l’Alliance Evangélique Mondiale et du Conseil Œcuménique des Eglise, mais Lausanne a fleuri, en partie, parce qu’il est un mouvement et non une organisation en soit. Il n’y a aucun «siège » de Lausanne et le réseau est entretenu par un petit personnel salarié, soutenu par des douzaines de volontaires éparpillés partout dans le monde. Le Mouvement de Lausanne a fourni une plateforme commune pour un large éventail de Chrétiens provenant des centaines de cultures et de langues, partageant tous un engagement évangélique commun à l’évangélisation du monde. Pour être précis, du fait que le Mouvement de Lausanne n’est pas une organisation ou une institution au sens formel, il trouve sa plus profonde joie à aider à faire fructifier les arbres d’innombrables entités Chrétiennes. Il affirme avec hardiesse que « nous qui partageons la même foi biblique, nous devrions être intimement unis dans la communion fraternelle, dans l’accomplissement de notre tâche et de notre témoignage. ». Le Mouvement de Lausanne a offert une plateforme mondiale où les mouvement Chrétiens du monde entiers qui sont souvent négligés pourraient se rencontrer ensemble et former des partenariats viables pour l’évangélisation mondiale. Le Mouvement, bien que centré sur l’Eglise, a aussi aidé à rattacher une armée d’organisations para-ecclésiales engagées dans la traduction de la Bible, l’éducation théologique, la distribution des littératures et l’évangélisation, pour ne citer que ceux-là.

L’Urgence de l’Evangélisation (Article 9)

Le Mouvement de Lausanne a favorisé une plus grande compréhension de combien de groupes ethniques n’a pas un accès suffisant au message de l’Evangile ou à une expression viable de l’Eglise. Ainsi, le Mouvement de Lausanne a aidé à favoriser toute une vague de recherches pour comprendre les barrières sociales, linguistiques, culturelles et de caste qui souvent empêchent les peuples d’entendre l’Evangile d’une manière compréhensible et culturellement pertinente. Différents critères sont nés pour définir ce qu’est exactement un « peuple non atteint » et exactement quel pourcentage d’un groupe a besoin d’être Chrétien avant que ce dernier soit déclaré « atteint ». Ceci a conduit à plusieurs chiffres allant de 4000 à 6000 différents groupes non atteints. Cependant, le Mouvement de Lausanne est connu pour son emphase théologique sur l’urgence de la tâche et l’importance de ce que l’Eglise s’assure que chaque groupe ethnique du monde ait accès à l’Evangile. La Déclaration de Lausanne va si loin jusqu’à appeler les Chrétiens des pays plus nantis à adopter des styles de vie plus simples afin de contribuer plus généreusement à l’œuvre de l’évangélisation mondiale. Il est aussi crucial que cette œuvre ne soit pas perçue comme une initiative de « l’Occident essayant d’atteindre le reste du monde », mais plutôt comme la responsabilité qu’ont tous les Chrétiens de chaque continent d’aussi bien envoyer que recevoir des missionnaires et des témoins transculturels pour la cause de Christ.

Evangélisation et Culture (Article 10)

Une autre particularité théologique du Mouvement de Lausanne a été une approbation de la culture humaine. Pendant que chaque culture manifeste l’évidence du pouvoir du péché, il est aussi vrai que chaque culture est « riche en beauté et en bonté ». Le Mouvement de Lausanne affirme que Dieu est la source et le soutien de la culture physique et sociale. En vertu de sa réalité Trinitaire, Dieu est inséparablement relationnel, et les relations humaines, initiées par Lui à la création représentent le reflet de sa présence dans la création elle-même. La croyance Chrétienne que Dieu est au-delà de toutes cultures humaines mais qu’il a malgré cela choisi de se révéler dans toutes les particularités des cultures humaines est une affirmation caractéristique de Lausanne. Dieu a choisi de se révéler dans le contexte des cultures humaines et par conséquent nous devons résister aux attitudes qui présupposent qu’une culture est supérieure à l’autre. L’Evangile a le pouvoir d’élever chaque culture et toutes les réalités de la Nouvelle Création qui y fait son entrée peuvent être exprimées dans toutes les particularités à facettes multiples de chaque culture.

En matière de communication de l’Evangile, l’Eglise à une longue histoire en ce qui concerne la contextualisation du message afin que les vérités immuables de l’Evangile puissent être comprises et reçues. Le dépôt historique de l’Evangile est immuable, mais la contextualisation reconnait le besoin de le « traduire » en des formes qui sont « compréhensibles et applicables aux peuples dans leurs différents cadres culturels de sorte que le message originel et l’impact de l’Evangile soient communiqués. [115] L’engagement à s’approprier la contextualisation empêche l’Evangile d’être communiqué uniquement à travers une loupe mono-culturelle et d’être séparé injustement de l’histoire vraie. Les vérités de l’Evangile sont immuables et ne sont pas déterminées par la culture, mais ces vérités ne peuvent pas être expérimentées, célébrées et communiquées sans être portées culturellement. Toute communication de l’Evangile y compris le Nouveau Testament lui-même, est un événement contextuel. Même une affirmation aussi simple que « Jésus est Seigneur » doit être communiquée dans un langage particulier dans un certain cadre culturel particulier. La contextualisation assure donc qu’on ne permette pas à la dimension objective et celle subjective de la révélation de s’éloigner l’unes de l’autre.

Education et Leadership (Article 11)

Le Mouvement de Lausanne a servi de guide en aidant l’Eglise à comprendre que l’évangélisation ne peut pas être théologiquement réduite à la « décision pour Christ » ou à quelque point de vue qui réduise le salut qui l’égale à la doctrine de la justification. En lieu et place, l’évangélisation inclut fondamentalement la formation des croyants disciplés et d’une toute nouvelle génération de leaders Chrétiens théologiquement éduqués. Le rôle de l’Eglise, des séminaires et organisations engagées dans le discipolat est crucial pour une croissance à long terme et une durabilité de l’église dans le monde. Chaque nation et culture doit aussi avoir accès à l’éducation théologique, et des opportunités doivent être données à chaque Chrétien de croitre dans le discipolat et le service. Ceci ne signifie pas qu’il faille exporter des formes occidentales d’éducation théologique dans le monde entier, mais plutôt, qu’il faut découvrir toute une gamme de stratégies efficaces pour la formation de tout le peuple de Dieu, ordonné comme laïc.

Conflit Spirituel (Article 12)

L’une des particularités théologiques les plus importantes qui est issues du fait de placer les missions dans l’œuvre plus large de la mission de Dieu dans le monde est la reconnaissance qu’en fin de compte, l’avancement de l’Eglise n’est pas une tâche logistique ou institutionnelle, mais a ses racines dans un conflit spirituel cosmique auquel on doit faire face dans la prière et la reconnaissance de la nature du combat spirituel. L’Eglise n’est pas simplement en train de combattre les forces de la théologie libérale ou des idéologies dangereuses ou expressions théologiques non chrétiennes. A la fin, nous sommes engagés dans un combat spirituel contre les principautés et les puissances du mal qui cherchent à contrecarrer l’Eglise et entraver le progrès de l’évangélisation mondiale. Ainsi, le Mouvement de Lausanne a inclus l’importance d’appeler à la pureté de l’Eglise, à la fidélité dans la prière et à la reconnaissance des forces spirituelles disposées contre nous.

La Puissance du Saint Esprit (Article 14)

Certaines expressions de l’Ecriture ont été parfaitement Christocentriques, mais n’ont pas toujours inclus l’aspect central du Dieu Trinitaire dans le travail d’évangélisation plus large et l’évangélisation du monde. Le Mouvement de Lausanne affirme que le Père est le grand initiateur, l’envoyeur et le but de toutes les missions. Le Fils est l’incarnation rédemptrice de la mission de Dieu. Le Saint Esprit est la présence de Dieu qui remplit de puissance pendant qu’il déroule la mission dans le monde. Sans la puissance et le témoignage du Saint Esprit personne ne peut être convaincu du péché, rendu capable de placer sa foi en Christ, ou grandir dans la foi chrétienne. C’est l’Esprit qui renouvelle l’Eglise, nous remplit de puissance et nous rend capables d’être ses véritables témoins dans le monde. L’Esprit rend aussi l’Eglise capable de manifester toutes les réalités de la Nouvelle Création au milieu d’un monde lié par le péché et la mort. Les dons et les fruits de l’Esprit sont essentiels à la vie et au témoignage de l’Eglise.

Le Retour de Christ (Article 15)

Enfin, la Déclaration de Lausanne embrasse une forte vision Chrétienne de l’histoire qui est formulée par une perspective eschatologique où le retour glorieux et visible de Jésus Christ mettra fin à l’histoire de l’humanité, accomplira son plan salvateur, jugera le monde et accomplira son royaume éternel. Ainsi, la mission de l’Eglise a été conçue par Dieu comme se déroulant entre l’ascension et le retour de Christ. Lausanne n’envisage pas l’émergence d’une utopie mondiale ou que le Royaume de Dieu deviendrait accompli en dehors de Son ultime intervention à la fin des temps. A la fin, la manifestation complète de la justice et de la paix sera le résultat de l’initiative et de l’action finales de Dieu. Ceci est un rappel constant que toutes nos actions et nos actes d’obéissance dans le monde doivent être dans le cadre de son initiative d’initier le plan de rédemption aussi bien que de l’amener à son accomplissement final En effet, notre ministère efficace dans le monde ne peut pas être pleinement compris en dehors de ce cadre théologique plus large dans lequel l’Eglise sert et obéit.

C’était à la fin du congrès de 1974 que Ralph Winter, un missiologue attitré, expliqua publiquement pour la première fois comment, même si l’Eglise toute entière était engagée dans l’Evangélisation efficace, cela ne pourrait conduire approximativement qu’à un milliard de nouveau Chrétiens. Il resterait encore deux millions d’autres personnes qui auraient été hors de portée de l’Evangile s’il n’y avait pas un témoignage transculturel intentionnel. [116] Ceci a conduit, comme nous allons le voir plus loin, a un effort beaucoup plus grand pour traverser les barrières culturelles avec l’Evangile de Jésus Christ.

Caractéristiques Théologiques du Manifeste de Manille et de l’Engagement du Cap

Le Manifeste de Manille

Le deuxième Congrès International pour l’Evangélisation Mondiale a eu lieu à Manille aux Philippines en 1989. Il est quelquefois appelé « Lausanne II ». Plus de 4000 leaders Chrétiens y étaient rassemblés de partout dans le monde, pour discuter des progrès dans l’évangélisation du monde et pour réfléchir sur comment le monde et le contexte des missions ont changé depuis le congrès de 1974. Tout comme le premier Congrès, le rassemblement de Manille a fini par la sortie de ce qui est devenu connu sur le nom du Manifeste de Manille. Il est important de comprendre que tant le Manifeste de Manille en 1989 que l’Engagement du Cap en 2010 n’étaient pas conceptualisés comme remplaçant la Déclaration de Lausanne ou pour opérer des changements majeurs dans les caractéristiques théologiques historiques du Mouvement de Lausanne. Plutôt, le but de ces documents est de bâtir sur les fondations de la Déclaration de Lausanne et de mettre en relief les nouveaux défis auxquels l’Eglise faisait face, ou les thèmes théologiques qui avaient besoin de plus grandes clarifications sur la base des réflexions plus profondes sur la Déclaration de Lausanne.

Le Manifeste de Manille s’articule autour de 21 Affirmations en ouverture qui ont largement réaffirmé la substance de la Déclaration de Lausanne. Ceci est suivi de douze Articles puis d’une conclusion finale qui va plus en profondeur au sujet des défis théologiques, culturels et ecclésiaux particuliers qui entravent l’évangélisation mondiale. Dans les Affirmations d’ouverture, il y a deux caractéristiques théologiques qui n’étaient pas présentes de façon explicite dans la Déclaration de Lausanne. Premièrement, il y a l’Affirmation que le Jésus de l’histoire est le même que le Christ de gloire (Affirmation 5). Cette affirmation approfondit l’intérêt de Lausanne au sujet des différentes tentatives théologiques pour séparer l’œuvre salvatrice de Christ de sa manifestation historique dans l’Incarnation telle que révélée dans l’histoire. L’idée que Christ peut être expérimenté de façon implicite à travers d’autres religions ou à travers divers mouvements spirituels n’est pas acceptée par le Mouvement de Lausanne. Ce point est plus exposé dans l’Article 3 qui renonce clairement au point de vue que le peuple Juif peut être sauvé par une autre alliance sans avoir à répondre personnellement à Jésus Christ. Par implication, ceci s’appliquerait clairement aux Musulmans, Hindous et Bouddhistes entre autres.

La deuxième caractéristique théologique du Manifeste de Manille, qui se trouve dans l’Affirmation 18, est l’appel à passer plus de temps à étudier la société pour mieux comprendre ses « structures, ses valeurs et ses besoins » comme faisant partie d’un plus grand travail qu’est le développement des stratégies missionnaires. L’affirmation implique qu’on embrasse plus fortement le travail d’anthropologie sociale et culturelle pour aider l’Eglise à mieux accomplir sa mission.

D’autres caractéristiques théologiques qui sont sorties du Manifeste de Manille incluent une affirmation explicite du rôle de l’Apologétique dans l’évangélisation du monde. Le Congrès était plus conscient de l’émergence d’une avalanche de défis intellectuels à l’Evangile Chrétien qui requièrent une réponse évangélique plus concertée. La déclaration a aussi bâti sur l’affirmation que la Déclaration de Lausanne fait de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme en affirmant clairement l’importance de prendre une position ferme en faveur de la liberté de religion d’un bout à l’autre du monde. Enfin, dans l’Article 8, le Manifeste de Manille voue plus d’attention à l’importance de la formation l’équipement et l’autonomisation des laïcs pour l’évangélisation du monde.

Bien que cela n’apparaisse pas dans le Manifeste de Manille, c’était au Congrès de 1989 que Luis Bush introduisit le concept qui en 1990 fut décrit comme la « fenêtre 10/40 ». Ceci se réfère à la zone du monde située entre 10 et 40 degrés au nord de l’Equateur où vit deux tiers du monde et qui est caractérisé par un fort taux de pauvreté et le plus faible accès à l’Evangile. Ceci a eu pour résultats que des douzaines d’agences missionnaires et d’églises ont commencé à orienter des œuvres missionnaires dans cette région particulière du monde qui représente le cœur du monde Islamique Hindou et Bouddhiste.

Engagement du Cap

En 2010 le troisième Congrès de Lausanne sur l’Evangélisation Mondiale a eu lieu à Cape Town. Plus de 4200 leaders évangéliques venant de 198 pays se sont rassemblés pour réfléchir sur le progrès de l’évangélisation mondiale. Le Congrès était précédé de trois ans d’étude et d’écoute de l’église au plan mondial afin de discerner quels étaient les problèmes théologiques et culturels clés auxquels l’Eglise mondiale allait répondre. Le document qui en est sorti, L’Engagement du Cap représente, d’une part, une affirmation claire de tous les points doctrinaux de la Déclaration de Lausanne. D’autre part, elle offre un recadrage de comment l’Evangile doit être proclamé au monde de manière plus efficace. Plutôt que d’émettre de nouveaux points doctrinaux, l’Engagement du Cap cherche à recadrer la discussion de telle manière qu’elle puisse être reprise et appliquées dans d’innombrables nouveaux contextes dans le monde entier. La rencontre à Cape Town fut le premier congrès qui a connu le plus de participation de Chrétiens du « Monde Majoritaire » que de Chrétiens du monde occidental. Elle était sans doute le rassemblement Chrétien le plus diversifié jamais tenu dans l’histoire du monde.

L’Engagement du Cap a réorganisé les affirmations de base de la Déclaration de Lausanne et le Manifeste de Manille autour du thème de l’amour de Dieu. Sans ôter des réalisations colossales de la Déclaration de Lausanne le fait d’avoir énoncé les points doctrinaux clés du Mouvement, il faut remarquer que l’amour de Dieu n’était mentionné qu’une seule fois dans tout le document. Il est devenu de plus en plus clair que les vérités de la Déclaration de Lausanne avaient besoin d’être retenues mais communiquées dans le contexte plus large de l’amour de Dieu. Le document est divisé en deux parties importantes. La première s’articule autour de dix thèmes centraux tels que « Nous aimons parce que Dieu nous a aimés le premier », qui est une nouvelle présentation de l’Article 1 de la Déclaration de Lausanne. Le document poursuit avec des Articles qui affirment que nous « aimons le Dieu vivant, nous aimons le Père, nous aimons le Fils, nous aimons le Saint Esprit, nous aimons la Parole de Dieu, nous aimons le monde de Dieu, nous aimons l’Evangile de Dieu, nous aimons le peuple de Dieu, et enfin, nous aimons la mission de Dieu. ». Ceci est le point doctrinal la plus importante de l’Engagement du Cap.

La seconde partie du document identifie six thèmes clés qui, encore, reprennent plusieurs d’entre les thèmes classiques du Mouvement de Lausanne. Plusieurs nouveaux éléments ont été mis en exergue dans l’Engagement du Cap, y compris prendre soin de la création (Partie II, II,5) et une forte critique de l’idolâtrie de l’évangile de la prospérité (Partie V,4). Le document est un appel au clairon pour l’église afin qu’elle demeure fidèle même au milieu d’un monde en ruine qui est nécessairement hostile à l’Evangile. Le Document est aussi plus consciemment averti de la diversité croissante de l’Eglise et du besoin même d’un de collaboration à un niveau plus élevé et d’un vrai partenariat qui permettra à l’Eglise d’accomplir le thème original du Congrès de Lausanne, à savoir, « L’Église entière annonçant l’Évangile entier au monde entier »

Impact Missiologique

La seconde partie de ce chapitre cherche à explorer l’impact missiologique plus large du Mouvement de Lausanne. Ceci sera exploré sous cinq thèmes.

La réaffirmation de la Missiologie Trinitaire et la « Missio Dei »: Le Dieu de Mission et l’Eglise des Missions

Comme noté dans les Articles 1 et 14 de la Déclaration de Lausanne et rendu même plus explicite dans les documents subséquents, Lausanne a amené le mouvement missionnaire évangélique au plan mondial dans un cadre plus pleinement Trinitaire. Il ne suffit pas de simplement proclamer Christ. Notre proclamation centrale doit être ré-conceptualisée dans le cadre plus large de la Mission de Dieu (missio Dei) et avec l’œuvre d’autonomisation qu’accomplit le Saint Esprit. Cette définition de l’expression missio Dei (la mission de Dieu) comme une manière de conceptualiser la mission a été à l’origine inventée par le missiologue Allemand Karl Hartenstein en 1934. Plus tard, en 1952, à une importante conférence sponsorisée par le Conseil Missionnaire International tenue à Willingen, en Allemagne, l’emphase théologique que l’action rédemptrice de Dieu précède l’église fut avancée, même s’ils n’avaient pas utilisé explicitement le terme missio Dei. L’expression fut plus tard popularisée par Georg Vicedom comme un concept clé dans les missions avec la publication en 1963 de son livre de référence, The Mission of God : An introduction to the Theology of Mission[1]. Vicedom a, avec perspicacité, conceptualisé la mission comme notre participation à la mission du Père d’ « envoyer le Fils ». Vicedom a déclaré que « le mouvement missionnaire auquel nous faisons partie a sa source dans le Dieu Trinitaire Lui-même ». [117] Cependant, l’application de ce concept a de plus en plus déconnecté l’église de la mission de Dieu. Le résultat fut une concentration sur le monde comme étant l’étape de l’activité rédemptrice de Dieu ce qui a marginalisé l’église et sa proclamation rédemptrice. Le rôle de l’église, au mieux, était simplement de montrer du doigt là où la société était en train de lutter pour l’humanisation ou là où le shalom de Dieu émergeait dans le monde.

Il y eu une période significative où les Chrétiens évangélique évitaient l’expression Missio Dei parce qu’elle était associée à la séparation de l’œuvre de Dieu d’avec la vie et le témoignage de l’église. Le Mouvement de Lausanne a aidé à réintroduire le concept de missio Dei et à reconnecter la théologie de missio Dei avec la compréhension claire que l’église est au centre de la manière dont la mission de Dieu se déroule dans le monde et, que l’église est, bel et bien, l’objectif rédempteur de Dieu. Pour être juste, cette reconnexion de missio Dei à l’ecclésiologie n’était probablement l’intention des leaders de Lausanne, mais elle est devenue la conséquence logique du fait que des centaines de leaders d’églises se réunissent régulièrement pour discuter de la mission au cours des rencontres régionales et des consultations sur des questions spécifiques qui ont été la charpente du Mouvement de Lausanne.

L’accent sur l’Accès à l’Evangile: Des Peuples aux Modèle d’immigration Mondiaux

La percée missiologique la plus importante du vingtième siècle est la prise de conscience de ce que les textes de l’Ordre Suprême traitaient du discipôlat des nations entières et du fait d’apporter l’Evangile à chaque peuple de la terre. Le mot « nations » dans le Nouveau Testament est la traduction du mot Grec ethne qui signifie « peuple » ou « groupe ethnique ». Le travail qu’a accompli Ralph Winter en servant de pionnier du concept de peuple non atteint et de Luis Bush avec celui de la fenêtre 10/40 sont deux compréhensions vitales qui ont été embrassées par les églises appartenant au Mouvement de Lausanne et par ricochet a aidé à faire de ces points une partie de l’héritage du Mouvement de Lausanne.

Ceci a eu pour résultat, non pas seulement une base théologique plus solide pour les missions mondiales, mais a généré des millions de nouveaux chrétiens et des dizaines de milliers de nouvelles églises au sein des peuples qui jusqu’ici n’avaient aucun accès viable à l’Evangile Chrétien. Au début du vingtième siècle, seulement 10% des Protestants du monde résidait hors de l’occident, et la grande majorité de tous les Chrétiens était en occident. Aujourd’hui, l’Eglise de Jésus Christ est le mouvement le plus diversifié dans l’histoire du monde. Plus de personnes, dans plus de pays utilisant plus de langues confessent le nom de Jésus plus qu’à n’importe quelle période de l’histoire. Le Mouvement de Lausanne a joué un rôle important dans l’éclosion de tant de nouveaux mouvement d’implantation d’églises autour du monde, y compris de nouveaux mouvements en occident, la plupart d’entre eux utilisant la Déclaration de Lausanne comme leur confession de foi.

Le travail remarquable du Joshua Project (Projet Josué), l’Initiative Adopte-un-Peuple, l’An 2000 et au-delà, la recherche extensive du Bureau des Missions Internationales des Baptistes Méridionaux, la World Christian Database (Base de données Chrétienne Mondiale), pour ne citer que ceux-là, n’auraient pas atteint le niveau où ils sont aujourd’hui sans le travail de Lausanne.

En tant que quelqu’un qui a suivi Lausanne dès le début du Mouvement, il est probablement juste d’observer que Lausanne est devenue plus concentré sur les praxis des missions, quelquefois au détriment de bonnes réflexions théologiques et missiologiques. Au cours de la période où le mouvement se formait, John Stott et Billy Graham représentaient un partenariat unique de la clarté théologique et les praxis du ministère. Les deux avaient une compréhension profonde du rôle important que joue chacun des deux concepts dans le succès et la durabilité du mouvement. Au fil du temps, le Mouvement de Lausanne est devenu plus mondialisé, plus diversifié, et moins centralisé. En effet c’est seulement au cours des dix dernières années que Lausanne pourrait réellement affirmer être un Mouvement mondial du point de vue de la représentativité. Toutefois, dans le processus, l’accent a été de plus en plus mis sur la pratique de la mission et la valeur générale de l’édification des relations transculturelles au sein du mouvement Chrétien mondial. Cependant, si Lausanne doit continuer comme une force vivante, les fondements théologiques du mouvement et l’appel à une réflexion missiologique plus profonde doivent rester au premier plan.

L’Emergence d’un Nouvel Œcuménisme: La face Changeante du Christianisme Mondial et l’effondrement du “Paradigme de l’Occident atteignant le Reste”

Aussi récemment que les années 1990 quand le magazine Christian History a publié la liste des cent événements les plus significatifs de l’histoire du Christianisme, il n’y avait aucune référence à aucun événement qui ait eu lieu dans le Monde de la Majorité ou été initié par les Chrétiens du Monde majoritaire. De la position avantageuse d’aujourd’hui, nous oublions souvent combien lente l’Eglise a été à reconnaître les développements globaux spectaculaires au sein de l’Eglise Chrétienne à travers l’Afrique, l’Asie et l’Amérique Latine. La pratique des Missions est restée largement structurée dans le paradigme qui affirmait qu’une église occidentale viable est en train d’être mobilisée pour atteindre le monde non occidental avec l’Evangile. Ce fut le Mouvement de Lausanne qui donna de la voix et, fournit presque littéralement, la plateforme pour des douzaines de nouvelles voix au sein du Christianisme Mondial. Le Mouvement de Lausanne a sponsorisé plusieurs conférences majeures dédiées à l’identification des leaders émergeants dans le monde entier. C’est à la consultation de 2004 à Pattaya, Thaïlande, qui a rassemblé 1.500 leaders venus du monde entier que Lausanne a commencé véritablement à être intentionnellement mondial quant à son leadership, sa représentation à des rencontres, et au fait qu’il prenne sérieusement sur lui la responsabilité de faire face à nombre de défis structurels, linguistiques et culturels qui cherchent à empêcher le Mouvement d’être pleinement mondial. [118]

La croissance des mouvements Chrétiens indépendants indigènes de seulement huit millions à l’orée du vingtième siècle à 423 millions à la fin du siècle a fini par être reconnue comme l’un des changements démographiques les plus significatifs en matière d’affiliation Chrétienne dans l’histoire. Les écrits de Philip Jenkins dans des livres comme The Next Christendom, The New Faces of Christianity et God’s Continent ont popularisé ce qui est devenu une réalité au sein du Mouvement de Lausanne. Dans une période de temps relativement courte, l’église occidentale a finalement commencé à reconnaître qu’elle était située dans un nouveau champ missionnaire émergeant, et que, de la plupart des mouvements Chrétiens les plus vivants et les plus en croissance dans le monde, nombreux sont situés à des endroits qui, des siècles durant, ont été considérés comme un champ de mission. De nos jours, il est impensable que l’évangélisation du monde soit même possible sans la pleine collaboration de « L’Église entière annonçant l’Évangile entier au monde entier ».

La Redécouverte d’un Evangile plus large: Un Evangile Holistique pour le Monde Entier

Le mouvement évangélique au cours des premières décennies du vingtième siècle était dangereusement isolé de la reconnaissance de notre engagement plus grand à servir les pauvres, combattre les injustices, et lutter contre les maux structurels plus large qui bloquent les gens et les privent de leur droit de vote. Un Evangile plus holistique a, bien sûr, toujours été l’héritage de l’évangélicalisme et un petit nombre était aussi attaché à cela que ceux qui sont dans le mouvement missionnaire. Cependant, la controverse fondamentaliste-moderniste de la fin du dix-neuvième siècle et du début vingtième siècle tendait à séparer l’évangélisation de l’action sociale de manières historiquement étranges à la vie de l’Eglise. Pour être plus large, le fondamentalisme tendait à tronquer l’Evangile, le réduisant à un message de salut personnel. Contrairement à cela, le moderniste tendait à équivaloir l’Evangile à notre témoignage social plus large, avec moins d’accent sur la repentance personnelle et la foi en Jésus Christ. L’Evangile, en effet, englobe les deux. Ce fut le Mouvement de Lausanne qui aida à modeler et à galvaniser l’Eglise autour d’une mission rédemptrice plus large. La consultation de Lausanne en 1982 sur le rapport entre l’évangélisation et l’action sociale fut l’un des nombreux évènements qui a aidé à recadrer cette question pour l’église. Aujourd’hui, des millions de Chrétiens qui ont été modelés par le Mouvement de Lausanne sont en train d’apporter une réponse aux questions allant du trafic humain à la protection de la création en passant par la pauvreté. En fait, Le Mouvement de Lausanne a sponsorisé des douzaines de consultations au fil des ans sur des centaines de questions, ce qui a permis aux Chrétiens de mieux penser au sujet des questions qui étaient l’héritage légitime du témoignage Chrétien.

Une Collaboration plus profonde avec l’Eglise toute entière: Une Nouvelle Compréhension du Partenariat

L’un des thèmes qui unissent tous les documents majeurs de Lausanne explorés plus haut est l’appel à une collaboration plus profonde avec l’Eglise Mondiale, particulièrement en rassemblant la « famille évangélique » plus large de l’Eglise mondiale. Le Mouvement de Lausanne, particulièrement au cours des premières décennies du Mouvement, tendait à éviter la collaboration avec les grandes entités conciliaires des Chrétiens. Cependant, au fil du temps, le Mouvement de Lausanne a ouvert des points de dialogue significatifs entre les églises Catholique Romaine, Orthodoxe Orientale, et Protestante du courant principal, particulièrement lorsqu’il est devenu claire que certains membres de ces mouvement étaient des Chrétiens plein de zèle qui partageaient l’engagement principal de Lausanne pour l’évangélisation du monde. Lausanne a aussi lutté pour se maintenir comme un « mouvement » plutôt qu’une « organisation ». En tant que mouvement, il fournit à une large variété de groupes une plateforme unique pour se rencontrer et collaborer autour d’un engagement commun pour l’évangélisation du monde. En tant qu’organisation, Lausanne peut créer vis-à-vis d’autres organisations qui ont toujours existé telles que l’Alliance Evangélique Mondiale. Lausanne doit travailler dur pour demeurer une « plateforme » pour de nombreuses autres organisations, les fraternités Chrétiennes et les mouvements d’église.

Lausanne se sent très à l’aise quand il aide à faciliter les partenariats dans la planification pratique des missions à la base d’un bout à l’autre du monde. Le Mouvement de Lausanne a facilité des discussions importantes qui se sont particulièrement focalisées sur les nouvelles compréhensions du partenariat. Par exemple, au Forum pour l’Evangélisation du Monde tenu à Pattaya en Thaïlande, plus de 1.500 leaders du monde se sont rassemblés pour discuter de 31 questions (problèmes) qui ont été identifiés comme des obstacles à l’évangélisation. L’une des plus importantes questions abordées à Pattaya est la question des partenariats sains. Il est devenu clair que nombre de ce qu’on décrivait comme étant un partenariat retient encore des relations malsaines à cause des différences de pouvoir qui surviennent inévitablement lorsque le pouvoir et l’argent entre en ligne de compte. Il y eut des conversations franches et ouvertes qui ont eu un impact significatif sur la pratique courante des missions à travers le monde. Il a été finalement reconnu que ces églises qu’on retrouve dans les régions les plus pauvres du monde, apportent à l’église mondiale des atouts substantiels qui ne peuvent pas être quantifiés financièrement.

Conclusion

Le Mouvement de Lausanne demeure une forte et vibrante force qui contribue à l’évangélisation du monde. Ceux qui à l’origine ont convoqué le Congrès de Lausanne en 1974 auraient à peine pu imaginer le prestigieux mouvement mondial qu’ils déclenchaient. L’héritage théologique de Lausanne a été l’une de ses contributions les plus durables à l’Eglise mondiale. Nul doute, la foi Chrétienne historique qui a résonné si clairement du Mouvement de Lausanne est, en fait, la base même de son aussi puissant impact missiologique. Ainsi, les caractéristiques théologiques et les impacts missiologiques ne sont pas deux choses séparées, mais une chose comprise sous deux angles. Il est clair que toute la Gloire et l’honneur vont à Dieu pour le fait qu’Il ait appelé à l’existence un tel mouvement qui, malgré ses nombreuses insuffisances, a tout de même été une source de bénédictions incalculables à des millions de nouveaux Chrétiens d’un bout à l’autre du monde. Il est difficile d’imaginer que l’église mondiale pouvait se rencontrer à un lieu aussi remarquable pour l’adoration et la discussion, et collaborer sur tant d’initiatives mondiales, avec des fruits aussi remarquables, sans la plateforme de Lausanne. Enfin, Lausanne, ce n’est pas une question de documents ou de rassemblements mondiaux. Lausanne, c’est des Chrétiens qui travaillent et prient ensemble avec le même engagement que nous pourrions vivre pour voir, dans notre génération, «L’Église entière annonçant l’Évangile entier au monde entier ». [119]

 

[109] Les trois documents qui servent de fondement pour le Mouvement de Lausanne sont accessibles sur lausanne.org . Toutes les citations dans ce chapitre proviennent des trois documents, La Déclaration de Lausanne, Le Manifeste de Manille, et l’Engagement du Cap sauf indication contraire.

[110] Pour en savoir plus sur la compréhension évangélique de l’autorité de la Bible, voir John R. W. Stott, The Authority of the Bible (Grand Rapids, MI: InterVarsity Press, 1999). Le Mouvement de Lausanne a embrassé à la fois ceux qui comprennent « sans erreur » comme inerrance dans chaque détail aussi bien que ceux qui affirme une inerrance limitée qui reconnait que la Bible est totalement digne de confiance même si les auteurs (humains) n’étaient pas tout le temps techniquement exacts sur certains faits scientifiques et historiques mineurs, ou lorsque des détails différents ou, des rapports généraux différents apparaissent quand plusieurs témoins racontent le même événement.

[111] Voir John R. W. Stott, The Cross of Christ, study edition (Grand Rapids, MI: InterVarsity Press, 2010).

[112] Pour plus de discussion sur le rapport entre l’écclésiologie et la nature de l’évangélisme, voir Simon Chan, Liturgical Theology (Grand Rapids, MI: IVP, 2006).

[113] Pour une discussion plus détaillée des discussions évangéliques autour du rapport entre l’évangélisation et l’action sociale, voir Timothy C. Tennent, Invitation to World Missions: A Trinitarian Missiology for the 21st Century (Grand Rapids, MI: Kregel, 2009), 387-406.

[114] Il existe différents critères que les organisations utilisent pour définir un “people” et pour déterminer s’il a été “atteint” ou “non atteint” avec l’Evangile. Les trois plus importantes bases de données publiques (qui utilisent tous différents critères) sont accessibles à www.joshuaproject.net , http://imb.org/globalresearch et http://worldchristiandatabase.org/wcd. Pour une discussion complète du role de Lausanne dans la discussion au sujet des peoples non atteints et comment ce thème a subi un développement au cours des quarante dernières années, voir Timothy C. Tennent, Invitation to World Missions, 354-386.

[115]Bruce J. Nicholls et David Hesselgrave, Communicating Christ Cross-Culturally, 143, 144.

[116] Le texte du Discours de Ralph Winter, dans son entièreté, y compris l’article envoyé à tous les délégués avant le Congrès de 1974, aussi bien que le vrai discours délivré par Winter à Lausanne est disponible à lausanne.org/documents .

[117] Georg Vicedom, The Mission of God: An Introduction to the Theology of Mission; traaduit par Gilbert A. Thiele et Dennis Hilgendorf (Saint Louis, MO: Concordia Publishing House, 1965), 5. Vicedom cite Hans Hartenstein.

[118] Tous les documents des groups de travail qui se sont rencontrés à Pattaya ont été publiés en trois volumes. Voir David Claydon (ed), A New Vision, A New Heart, A Renewed Call (Pasadena, CA: William Carey Library, 2005). Plusieurs d’entre ces documents sont aussi disponibles à lausanne.org/documents .

[119] L’expression de Lausanne bien connue, “L’Église entière annonçant l’Évangile entier au monde entier” se réfère au grand mandat missiologique de l’église mondiale. Ce mandat ne peut pas être accompli uniquement par ceux qui sont connectés au Mouvement de Lausanne, ou une dénomination, une organisation ou un mouvement. Ceci est plutôt une expression visionnaire qui montre du doigt ce grand objectif commun au peuple de Dieu de tous les temps et de tous les âges et qui ne sera pleinement consommé qu’au retour de Christ.

 

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